Tennis professionnel, arbitres amateurs

Cédric Hamiet, le seul arbitre "badge d'or" belge francophone, entouré de Guillaume Woelfle (badge blanc) et Floriane Dierckx (badge de bronze) sont les trois arbitres belges présents à Roland-Garros. Les deux premiers cités nous racontent les coulisses d'une profession (ou plutôt passion) méconnue.

"On attend surtout d'un arbitre qu'il prenne une décision"

Quelles sont les caractéristiques d'un bon arbitre ?
Cédric Hamiet: "Tous les arbitres de haut niveau sont mis, dès leur cycle de formation, sous une forme de pression. Un peu comme si un joueur tentait de les influencer. C'est le signe de la qualité d'un arbitrage de pouvoir résister à cette pression, de tenir une décision, de communiquer de manière claire la bonne réponse, de ne pas changer d'avis avec fermeté... Un arbitre, ce n'est pas que des bons yeux. Il faut rester calme, afficher du sang-froid, avoir la bonne répartie... La communication représente 80 % du boulot."

Guillaume Woelfle: "Les arbitres jouent parfois aussi à l'intox... Et une bonne réponse bien placée pourra rapidement clore une éventuelle discussion stérile de plusieurs minutes."

Le plus important, dès lors, est de ne pas laisser la place à l'incertitude...
C.H: "On attend d'un arbitre qu'il ait raison... Mais surtout qu'il prenne une décision ! Le joueur espère bien sûr qu'elle ira dans son sens. A la limite, il préférera un arbitre qui se trompe mais qui a un argumentaire derrière qui tient la route plutôt qu'un juge qui hésite et change deux fois d'avis."

Le tennis est-il un sport plus complexe à arbitrer qu'il n'y paraît ?
C.H: "Si vous vous en tenez aux 31 règles, cela peut paraître accessible. Mais, c'est sans prendre en compte toutes les procédures pour l'ATP, le WTA, le Grand Chelem, la coupe Davis... Ce sont, rien que pour cela, quatre procédures différentes et autant de pages de règlements à connaître... Et puis, il faut maîtriser l'Anglais, y compris pour arbitrer les tournois belges de niveau international."

Comment se passent les interactions entre juge de ligne et juge de chaise ?
G.W.: "Il y a une série de codes entre nous. A chaque changement de côté, ou même entre deux points, un petit regard suffit pour se comprendre. Si j'ai jugé un point chaud et que je ne suis pas sûr de moi, je regarde en direction du juge de chaise et s'il a vu la même chose que moi, il me le fera comprendre d'un signe très discret et ça permet de se concentrer sur le point suivant. Imaginons qu'un coach discute avec son joueur dans la tribune qui est dans mon dos (ce qui est interdit par le règlement, ndlr), je peux aussi le signaler au juge de chaise avec un petit geste… il sait ce que ça veut dire et il s'occupe de réprimander le coach en question. Plus que dans d'autres sports, l'arbitrage peut se faire avec un langage non verbal."

A force de côtoyer les joueurs sur le circuit, en faites-vous des amis ?
G.W.: "Disons qu'avec les joueurs, on ne se connaît pas vraiment mais on se reconnait. On se salue et puis c'est tout, on a un code de déontologie qui nous oblige à garder nos distances. On ne peut pas arbitrer un copain ou quelqu'un de sa famille. Imaginons que je sois de la même génération qu'un joueur belge et que je l'ai beaucoup côtoyé étant jeune, avant de prendre la direction de l'arbitrage, je ne peux pas l'arbitrer. Si je ne déclare pas avant un tournoi "Attention, je ne peux pas arbitrer untel car je suis proche de lui", je fais une erreur déontologique. Il y a comme cela 25 règles à respecter, comme avoir une bonne vue, s'habiller de manière classe, ne pas boire d'alcool pendant les tournois, etc."

C.H.: "Les amitiés arbitres-joueurs se nouent éventuellement quand la carrière du joueur est terminée. Je suis personnellement très proche de Kristof Vliegen depuis qu'il a arrêté."