« J'ai enfin un corps qui va avec l'esprit...»

Dans une 'vie précédente', Damien était obèse. Il a pesé jusqu'à 120 kg et souffrait de nombreux autres troubles. C'est ce qu'il nous a raconté. Et comment, aujourd'hui, il utilise son 'nouveau corps' pour exercer une activité professionnelle.

Liège, Parc de la Boverie. 25 octobre 2017.

Pour ce nouvel épisode de «J'ai changé ma vie », c'est le personnage central de ce reportage qui a pris les devants en nous contactant directement. Au loin, Damien Nagy (27 ans) avance vers nous le pas assuré , sac de sport jeté sur l'épaule. T-shirt tendu sous sa veste de cuir, jeans et basket pour le vestimentaire du jour. D'emblée, le jeune français nous remercie de notre présence dans la cité ardente. « Vraiment merci de me rencontrer et de prendre du temps... » Merci à toi surtout Damien de nous avoir contacté via notre bouton Alertez-nous de DH.be!

Dans une 'vie précédente', Damien était obèse. C'est ce qu'il nous a raconté.Et comment, aujourd'hui, il veut utiliser son 'nouveau corps' pour exercer une activité professionnelle. Il a pesé jusqu'à 120 kg et souffrait de nombreux autres troubles. « Je n'étais pas le même gars, j'avais une tête différente... Je souffrais d'hyperthyroïdie qui a entraîné une forte prise de poids. Le souci, lorsque vous prenez des masses de graisses dans le corps,c'est que vous subissez une inversion du taux de testostérones et d'œstrogènes. Cela a pratiquement mené à l'impuissance dans mon cas. Je n'avais plus aucune libido. Sans parler de gynécomastie (Ndlr : développement excessif des glandes mammaires chez l'homme) ... »

C'est un dérèglement hormonal qui a entraîné Damien de ce côté de la balance. Mais également le manque de perspective et d'espoir... « Ma mère a toujours prôné une alimentation stricte et saine. On ne peut pas même dire que je mangeais beaucoup. Lorsque les efforts ne paient pas, vous baissez les bras, vous abandonnez... » C'est alors que Damien a gonflé... Un schéma classique se met en place avec une vie sociale réduite à néant. Par manque de confiance en soi. On ne s'apprécie plus.... Entre 20 et 22 ans, supposées être les plus belles années de la vie, Damien vit un enfer. Il est en dépression totale. Il se plaint en permanence, râle et trouve des excuses pour justifier son immobilisme. La prise de poids est constante.

«A schéma identique, je serais probablement mort vers 35 ans à cause du coeur », nous dit-il humblement.
Pourquoi avoir pris la peine de nous envoyer un message sur notre site? «Mon parcours peut avoir du sens pour les gens. J'ai croisé pas mal de personnes qui ne croyaient pas suffisamment en elles pour changer de vie. Je suis la preuve, comme je viens de loin, qu'avec de la patience et de la détermination tout devient réalisable. Mon expérience n'est peut-être pas la plus extraordinaire mais j'a ienvie d'apporter ma petite pierre... »

Damien, originaire d'Aquitaine, n'a pas eu le parcours scolaire rêvé. Dès ses 14 ans,il a commencé à travailler, le plus souvent comme simple ouvrier. «J'ai commencé bûcheron en convention d'apprentissage. En France, il est permis de bosser très jeune sous ce type de contrat.C'est un peu l'équivalent de l'IFAPME en Belgique francophone. J'ai été formé jusqu'à mes 18 ans. Ensuite, je suis passé de jobs alimentaires en jobs alimentaires... C'était compliqué de garder un travail sans posséder le diplôme adéquat. En France, le CDD (Ndlr: contrat a durée déterminée) sert surtout de main d’œuvre temporaire sans embauche ferme à la clé. »

Le premier contact entre Damien et Liège remonte à la fin de l'année 2012. Il débarque dans la ville wallonne en besoin de rupture. Il vient de connaître une déception professionnelle en France et a besoin d'une nouvelle perspective. «Je ne suis même pas venu en Belgique avec l'idée de perdre du poids. Cela faisait 10 ans que j'enchaînais les petits boulots et j'en avais vraiment ras-le-bol... J'étais en vacances donc chez une amie et j'en ai profité pour fréquenter une salle de sports. Là, j'ai rencontré deux personnes qui m'ont aidé à changer ma vie. »

Deux hommes ont changé la vie de Damien

En fréquentant une salle de sport du côté de la place Saint-Paul, Damien y fait la rencontre de deux hommes qui vont l'aiguiller et l'aider à devenir quelqu'un d'autre. Ces deux hommes sont Serge Lomami (actuel manager de la salle Jims) et Franck Duboisse. Ce dernier est un ex-champion du monde de karaté en chaise.
«Serge m'a repéré lors d'un cours collectif où j'avais souffert (rires)... Il m'a présenté directement à Franck qui m'a fait profiter de ses grandes compétences en terme de rééducation musculaire métabolique pour permettre une remise en place de la base fonctionnelle du corps. Comme il entraînait des handicapés, j'ai parfois du réaliser des séances d'entraînements comme si un membre me manquait. Cela m'a permis d'avoir conscience de mon corps et de la chance qu'il fonctionne bien malgré le surpoids. Si je dois remercier quelqu'un, ce sont bien ces deux messieurs !»

Une nouvelle vie et de nouveaux objectifs !

Depuis quelques mois, Damien s'est inscrit dans une série d'agences en tant que mannequin et comédien figurant dans des films ou des séries. Il est aussi très attiré par le doublage et la photo. Un univers qu'il aimerait bien intégrer davantage. Il faut dire que sa voix cassée, un peu rocailleuse, passerait pas mal à l'écran. «Pour être honnête, à la base, les photos faisait surtout partie d'une sorte de thérapie mise en place pour mon changement de vie. Quand vous avez été gros, vous avez le syndrome de l'ancien gros. On est svelte mais on se voit toujours en surpoids. La photo permet de fixer ce nouveau corps dans l'esprit... » Voilà un conseil crucial : ce n'est pas pour l'image qu'il faut changer son corps, c'est pour qu'il corresponde à l'esprit de la personne !

Le rêve d'être comédien ? Il le caresse depuis longtemps. «Quand j'étais en surpoids, c'était déjà ma volonté. Mais avec cette apparence, difficile de transparaître à l'écran. Aujourd'hui, c'est beaucoup plus concret. Je tiens en tout cas un début de quelque chose puisque je fais partie de trois agences. J'ai déjà fait de la figuration dans un film. C'est là que ma vie a changé. J'ai enfin trouvé un corps qui aille avec l'esprit ! J'ai faim de contacts et d'expériences».

Le processus de perte de poids et de (re)musculation du corps a été graduel chez Damien, il avoisine aujourd'hui les 80 kg et n'a jamais du recourir la chirurgie. Un changement physique qui a étonné son entourage ! «Ma mère ne me pensait pas capable d'avoir une telle évolution. Il faut dire que plus jeune j'étais vraiment fainéant et défaitiste. Elle a été très fière de mon parcours. Par contre, avec mes copains en France, cela s'est soldé par une réelle fracture de l'amitié. Je l'ai ai tous perdu... En deux mots, je me suis laissé aller trop longtemps et aujourd'hui j'ai faim de défis. Mes potes sont plus dans une vie simple, toute tracée. Je le respecte mais mon esprit a aussi changé en même temps que mon corps. La nouvelle confiance que j'avais en moi a été interprétée comme de la vantardise... Ils n'ont pas compris.»

En ce mois d'octobre 2017, Damien se sent 'à fond la forme' ! Mais, il n'est pas pour autant à l'abri d'une rechute comme en début d'année. Mais il a su remonter immédiatement la pente. «Il m'est arrivé une sérieuse bricole... On m'a volé ma voiture. J'ai perdu mon job et mon appartement dans la foulée. Résultat ? J'ai pris dix kilos à cette période... mais tout est rentré dans l'ordre grâce au mental».

Le jeune français en a retiré beaucoup humainement et prodigue le conseil suivant. «Il faut prendre absolument du recul. Se demander ce qu'il est possible de faire avec ses propres ressources pour dépasser un écueil auquel on peut être confronté. S'entourer aussi de personnes qui peuvent vous tendre la main et vous faire avancer. C'est le bon moment aussi pour faire un état des lieux de sa vie».

Modèle vivant pour les beaux-arts de Verviers

Difficile d'imaginer, après son parcours de vie, Damien... nu au milieu d'étudiants en expression artistique. Et pourtant, pour lui c'est une façon de gagner sa vie et de se... tester ! «Il faut le voir comme un genre de défi pour savoir s'il me reste des complexes. Totalement à découvert devant les autres, je vois si je suis à l'aise et en paix avec moi-même. Cela offre une véritable aisance par rapport aux autres et leur regard. Après, c'est plus facile aussi d'affronter une caméra ou un objectif».
Une démarche qui entraîne à son tour des compliments et de la prise de confiance. Ce 'nouveau corps' exige-t-il une attention de tout les instants ? «Je ne me prends pas spécialement la tête. J'ai mis en place certains automatismes par rapport à la nourriture. Je me fais un programme tout simple en tenant à l’œil l'apport en micro-nutriments, glucides, lipides et les protéines. Je suis devenu mon propre diététicien. Un automatisme qui a pris du temps a être intégré et compris. Ce qui ne veut pas dire que je me refuse une bonne petite bouffe entre amis de temps en temps ! »

L’obésité en Belgique : les chiffres

Dans notre pays, 51 % de la population adulte est en surpoids, soit un peu plus d’un adulte sur deux. Dont 12 à 16%, à peu près, d'obèses.

Parmi les jeunes de 10 à 20 ans en Communauté française, 17,4 % présentent déjà une surcharge pondérale, dont 6,1 % sont déjà en obésité, d'après une étude HBSC réalisée par l'Ecole de santé publique de l'ULB.

La tendance empire alors que le nombre de jeunes de 10 à 20 en surcharge pondérale est passée de 11,9 à 16,9 % de 1994 à 2014, s'inscrivant dans la tendance de la "pandémie d'obésité" globale. A noter que les enfants du primaire sont davantage préservés (de 11,4 % à 12,8 % dans le même délai). En outre, trois enfants sur quatre en primaire font du sport deux fois par semaine. Un chiffre qui chute à 63 % dans le secondaire.