Dimanche 18 mars. Grand-Prix de Denain (Nord-Pas-de-Calais). 142 cyclistes de 21 équipes différentes sont au départ. Parmi celles-ci, on retrouve le duo Groupama FDJ et AG2R La Mondiale issues du World Tour, 15 formations "ProContinentale" (division 2), mais aussi quatre équipes "Continentale", soit la troisième et dernière division. Au bas de cette échelle du cyclisme mondial, la plupart des coureurs n'ont pas le statut de professionnel et gardent un boulot à côté.
Cette semi-classique française, sorte de répétition générale en vue des classiques pavées, est donc le théâtre d’une lutte inégale entre des formations aux budgets diamétralement opposés.
Nous en avons profité pour vous proposer une immersion chez AG2R La Mondiale ainsi que chez Sovac Natura4ever, une petite formation algérienne aux accents très belges puisqu’elle est dirigée par Geoffrey Coupé, ancien coureur originaire de Frameries, et composée de nombreux coureurs issus du plat pays... et d’un certain Davide Rebellin, 46 ans.
L'après course: prise en charge maximale vs retour à la maison sans même prendre une douche
Les derniers kilomètres restent en travers de la gorge du DS d’AG2R. Il n’a pas accepté l’erreur de placement de Rudy Barbier qui a mis à mal la stratégie de fin de course. Il a félicité l’ensemble de l’équipe mais n’a pas hésité à faire comprendre son mécontentement à son leader lors du débriefing.
Une fois le speech terminé et la douche prise, les coureurs sont libres de rentrer chez eux. "Il n’y a pas de soins au programme car nous n’avons plus accès à l’hôtel", explique la kiné Dorothée Vaillant.
Les coureurs d’AG2R La Mondiale ne doivent même pas s’occuper de leur vélo. Le mécanicien et les assistants se chargent de les nettoyer, de les contrôler et de les ranger dans un bus rempli de cadres et de roues dont le prix ferait saliver beaucoup d’équipes de divisions inférieures.
En voiture encore tout transpirant
Chez Sovac Natura4Ever, l'après-course de Mario Buscema a débuté avant même sa descente de la voiture, lorsque Geoffrey Coupé l'appelle: "Dis Mario, toi qui maîtrises mieux le néerlandais que moi, tu peux voir avec Alexander Geuens comment il se sent ? Il a été lâché un peu tôt tout à l'heure, non ? On décolle demain pour la Tunisie, on y va pour la gagne, je veux qu'on reprenne la première place du classement par équipes sur l'Africa Tour. Il est prévu dans l'équipe mais je veux être sûr de disposer de coureurs au top. S'il ne se sent pas à 100%, je mets son billet d'avion au nom de Rebellin, qui a envie devenir". Le directeur sportif s'exécute et Alexandre, malade, laissera finalement sa place à son capitaine de route.
Matthias Legley tente, lui, de se réchauffer depuis une bonne demi-heure suite à son abandon avant le dernier tour. Il nous raconte son échappée avec Van Aert et huit autres coureurs entre la première et la deuxième heure de course: "C'était incroyable, on roulait à 50km/h, parfois plus, et je voyais les jambes de Van Aert tourner tellement rond, alors que moi je commençais déjà à pédaler carré. Je n'ai pas eu besoin de la consigne de Mario pour prendre moins de relais parce que j'étais à bloc. Certains coureurs de l'échappée ont réclamé que je collabore mieux, mais ils ont ensuite vu que j'étais bel et bien à 100 % de mes possibilités."
Robin Stenuit, lui, s'est changé très rapidement après sa descente du vélo et est prêt à prendre la route pour Villers-la-Ville, où il habite, 20 minutes à peine après qu'il ait passé la ligne. Il ne le sait pas encore, mais Denain aura eu raison de lui et, fiévreux, il abandonnera le Tour de Tunisie dès la première étape, mardi.
La conclusion de la journée revient à Geoffrey Coupé, très lucide au moment d'analyser la prestation de ses hommes: "Notre niveau, ce sont les courses 1.2. En 1.1 et en hors-catégorie, on est là pour prendre de l'expérience avant tout. Si on peut montrer le maillot, c'est tout bénef car une seule heure de présence à la télévision rentabiliserait l'investissement de nos sponsors. Ici, je suis déjà content d'avoir placé un coureur à l'arrivée. Robin va prendre de l'expérience, d'autant plus qu'il n'est pas encore à son pic de forme. Et Matthias nous a faits vibrer dans l'échappée avec Van Aert."