Depuis 1993, sur décision de l’Assemblée générale des Nations-Unies, le 15 mai est la journée internationale des familles. À cette occasion, La Dernière Heure a voulu partir à la rencontre des noyaux familiaux d’aujourd’hui.
Un panel de 802 familles de Bruxelles-Wallonie a été sondé par l’institut Dedicatedentre le 5 mai et le 9 mai 2017. 68% des répondants sont “en couple” et 19% se déclarent “célibataires”. Plus d’un ménage sur dix est une famille dite recomposée (13%).
“D’une manière générale, on constate que la famille belge est heureuse”, explique Marc Dumoulin, administrateur-délégué de l’institut de sondage Dedicated. Une famille sur deux se dit extrêmement heureuse. 49% des sondés attribuent une note de 8-9 ou 10 sur 10 à leur niveau de bonheur. Si elles devaient noter leur bonheur, 43% des personnes lui donneraient une note sur dix comprise entre 6 et 7. Les plus satisfaits sont les hommes (51% contre 46% des femmes). “La satisfaction augmente lorsque les contraintes familiales liées aux âges des enfants diminuent”, constate Marc Dumoulin. “Ainsi, 55% des familles qui ont un ou plusieurs enfants entre 19 et 25 ans s’estiment extrêmement satisfaite au niveau de leur sentiment de bonheur. Ce sentiment n’est partagé que par 44% des parents d’enfants de moins de 3 ans.”
Ce qui rend heureux les parents est une accumulation de divers éléments tels que l’entente avec ses enfants, le respect des enfants, la bonne ambiance familiale, le logement, la qualité de l’alimentation, la réussite scolaire des bambins ou encore, entre autres réponses, le temps passé en famille.
En la matière, le Belge francophone ne se plaint pas trop. Malgré un emploi du temps bien chargé, 72% des parents estiment passer suffisamment de temps avec leurs enfants. 25% regrettent de manquer de moments privilégiés. La principale raison est l’emploi.
Plus d’un parent insatisfait sur 10 trouve que son enfant a “trop de loisirs” (14%). Dans 69% des familles, un ou plusieurs enfants pratique(nt) un sport; 31% font des activités extrascolaires d’expression artistiques telles que le théâtre, la danse, le dessin...) et 29% des ménages rapporte que leur progéniture suit des études complémentaires en langue étrangère, informatique... Enfin, “il y a un instrument de musique dans une famille sur quatre”, constate Marc Dumoulin. Les parents estiment que cela est positif pour l’enfant et sa sociabilité. Un bémol cependant: 41% des adultes font des sacrifices financiers pour permettre aux jeunes de pratiquer une activité. Du côté des familles monoparentales, le chiffre remonte à 49%.
47% des répondants affirment faire du sport eux-mêmes; 16% des études autres que l’enseignement obligatoire et leur travail; 14% des cours d’expression artistique et 10% apprennent la musique. Le motif financier est également évoqué comme étant un frein. Le coût des milieux d’accueil pour les tout-petits est aussi un souci. 28% les trouvent trop chers. Les heures d’accueil posent problème aussi: 50% aimeraient que la crèche ou la garderie “ferme plus tard”.
Un tour d'Europe en mobil'home
Le tour des Jorobocar. C'est ainsi que Valérie Dorthu et son époux, Bertrand Chaumont, ont appelé leur périple européen sur Facebook. "C'est une contraction des prénoms de nos quatre garçons: Jonas, Robin, Boris et Oscar", explique Valérie.
La famille Chaumont a fait un tour d'Europe de juillet 2016 à janvier 2017. "On l'a préparé durant deux ans. On s'est renseigné sur différents forums et salons du voyage. On s'est dit que si on voulait le faire, il fallait le faire avant que notre aîné n'entre en secondaires. On s'était fixé 2016 comme limite. Mon mari a pris un congé parental de six mois. Moi, j'ai arrêté mon activité d'accueillante pour enfant. J'avais prévenu que j'arrêtais avant juillet 2016."
Ils ont épargné durant deux ans. "On nous a dit que pour faire un tel voyage, à 6, il fallait à peu près 2.000 euros par mois. Nous avons un peu dépassé ce plafond dans les pays nordiques, mais nous avons rééquilibré le budget dans les pays de l'est. Au final, pour 6, il fallait bien une réserve de 2.000 euros par mois."
Pour des raisons pratiques, leur maison, à Thimister-Clermont, ne pouvait être louée durant six mois. "Mon filleul est venu habiter à la maison. Ca lui a permis de vivre seul un moment. Et nous, nous partions en sachant que la maison était occupée."
Les enfants, âgés de 12, 10, 6 et 4 ans, ont embarqué avec leurs parents à bord d'un mobil'home après leur année scolaire. "On s'était arrangés avec l'école", précise la mère de famille. "On leur avait expliqué notre projet. On avait demandé au corps professoral et à la direction s'ils préféraient qu'on fasse de l'enseignement par correspondance ou s'ils nous soutenaient et nous envoyaient la matière des deux grands par mail."
C'est la dernière solution qui a été retenue. "Les professeurs ont envoyé la matière par mail", poursuit Valérie Dorthu. "Ils suivaient notre périple avec les enfants de leurs classes via Facebook. Nous avions des rendez-vous par Skype aussi."
La joyeuse tribu est partie à la rencontre de l'Europe. "Nous sommes passés successivement par le Danemark, la Suède, la Norvège, le Cap Nord, la Finlande, la Suède à nouveau. Nous avons pris le bateau pour la Pologne. Nous y avons visité l'est avant de prendre la route pour la Slovaquie, la Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie, la Grèce, l'Italie et la France."
Ce que les enfants ont préféré? "On a beaucoup visité. Ils sont curieux. Ils ont aimé le voyage. Le Cap Nord, le Vésuve et le Vasa à Stockholm les ont beaucoup impressionnés!"
Les nuits aussi étaient des aventures. Les paysages qui s'offraient à eux au réveil et au coucher sont dignes de cartes postales. On campait partout où on le voulait dans les pays nordiques. On pouvait même faire du feu! Dans les pays de l'Est, il était préférable d'aller dans des parkings surveillés. Il n'y a eu qu'une seule fois où on ne se sentait pas à l'aise durant le voyage. On a redémarré et on s'est posés 15 kilomètres plus loin."
A leur retour en Belgique, les enfants ont repris le chemin de l'école. "Ils ont repris l'école sans difficulté, leur niveau n'était pas mauvais", se souvient Valérie Dorthu. "Ils ont été des petits héros durant quelques jours. Et puis, le quotidien a repris le dessus." Bertrand a repris son activité de bucheron élagueur à la commune de Herve.
Le retour à la maison a été un peu plus insolite. "La maison semble très grande!" Un grand tri a été effectué: "On a pas mal vidé et trié quand on est rentrés. On s'est rendu compte qu'on avait accumulé pas mal de choses superflues. Et, étrangement, les disputes entre les enfants y sont plus nombreuses que dans le mobil'home. Pendant six mois, il n'y a pas eu de clashes. On a vécu paisiblement dans un espace restreint."
Le plus jeune enfant, Oscar, ne se souvenait plus trop de la vie à la maison. "Il avait trois ans quand on est partis. Il ne se souvenait plus où se trouvaient les toilettes et sa chambre. "
Eugénie et Pascal se sont rencontrés en 2004. Tout va très vite ensuite pour le couple amoureux. En 2005, ils se marient. Un an plus tard arrive Joséphine. Clarisse voit le jour en 2007 et Félicie en 2009. "Au début, on embrassait un mode de vie traditionnel", explique Eugénie. "On vivait dans une maison, on travaillait tous les deux et nous avions trois filles."
"Le bureau m'a proposé une mission à Istanbul", se souvient Pascal. Eugénie continue: "On a réfléchi et puis on a tenté l'aventure. On a pris nos valises uniquement. Que le strict minimum. On est sortis de notre zone de confort, cette aventure nous a changés pour toute la vie. Les filles allaient à l'école franco-turque. Elles prenaient des cours de turc quand les autres enfants apprenaient le français. On a voyagé un peu, on a rencontré des familles, on a noué des liens. On est revenus de Turquie avec une quatrième fille, Léonie, née en 2013."
De retour en Belgique, ils s'installent dans une maison à la campagne. Eugénie décrit: "On est partis vivre au milieu d'un bois, dans une maison isolée. J'étais toujours en pause-carrière." En 2014, deux petites "surprises", Adèle et Marthe, viennent compléter la famille. "On désirait un autre enfant, elles étaient deux!"
La famille au complet revient vivre à Bruxelles quelques mois après la naissance des fillettes. "En 2015, on est revenus vivre à Bruxelles." Eugénie, qui est professeur de français, a repris le chemin des classes. Elle enseigne le français à l'institut Cardinal Mercier. "J'ai de la chance de travailler dans une école avec une directrice compréhensive et j'ai l'opportunité d'avoir des horaires qui me permettent de m'occuper de mes filles. J'ai besoin de travailler pour mon épanouissement personnel et intellectuel. Ce n'est pas tous les jours facile, c'est parfois fatigant, mais j'aime ce que je fais. Je travaille en 4/5e."
Financièrement, six filles, c'est un coût. "Quand on achète des chaussures, on les achète pour les six en même temps." A près de 100 euros la paire de chaussures, les parents déboursent quelque 500 euros rien que pour chausser leurs filles. Les courses, c'est en ligne, une fois par mois. "Je commande par internet. Une fois par semaine, je vais acheter des produits frais et il ne reste rien dans mon frigo fin du mois!"
Avoir six filles à la maison, c'est une organisation. "J'ai une femme très organisée", déclare fièrement Pascal. Le matin, ils gèrent les enfants à deux. "On se réveille, en semaine, à 6h45. A 7 heures, les trois grandes se réveillent et se préparent. A 7h15, on déjeune ensemble à 5. Léonie nous rejoint vers 7h30. Vers 7h50, Pascal embarque les filles pour l'école. Les petites se réveillent doucement, je leur donne le biberon et vers 8h30, il embarque les petites pour la crèche. Il gare la voiture puis revient prendre son scooter. Vers 8h50, mon mari part au boulot et moi je m'occupe des chiens avant d'aller travailler en scooter aussi."
La journée de boulot d'Eugénie prend fin vers 14h30. Elle reprend son scooter, le dépose à la maison et va attendre ses quatre grandes filles à la sortie de l'école. "A 16 heures, c'est le goûter, la suite dépend des activités de chacune. Vers 17h, entre deux devoirs, je vais rechercher les petites à la crèche. Aux environs de 17h30, tout le monde est là, les devoirs sont faits. C'est l'enchaînement douche, préparation des -vêtements pour le lendemain et le bain des petites pendant que l'un de nous cuisine. A 18h45, c'est le repas du soir." A table, ça papote, ça discute dans tous les sens. "Mais ça se passe toujours dans la bonne humeur!" Vers 19h30, toutes les filles montent. "Les grandes peuvent lire. Elles lisent beaucoup et ont toutes les trois droit à des heures de coucher différentes. Joséphine va dormir vers 20h45, Clarisse vers 20h30 et Félicie vers 20h15. Chaque âge ses privilèges."
Quand les filles sont au lit, Pascal et Eugénie rangent, s'occupent du linge, préparent les pique-niques pour le lendemain matin... "On ne regarde pas la télévision, on préfère papoter!"
Le couple ne repose sur personne d'autre que lui. "Nous avons choisi de fonder une famille nombreuse. Parfois, on fait appel à une babysitter, mais la plupart du temps, on fait tout nous-mêmes", précise la mère de famille. "Et le temps libre que nous avons, nous le passons Pascal et moi. La famille repose sur une base, qui est notre couple. Il faut que nous soyons bien et que nous prenions soin de nous. Le couple est le plus important."
Eugénie conclut: "je dis toujours qu'on ait un, deux, six ou dis enfants, c'est le même boulot. On a une famille fort soudée, on a trouvé un bon équilibre. La famille idéale, c'est la famille que papa et maman choisissent."
Parvenir à croiser toute la famille Kervyn de Meerendré ou les inviter tous à souper relève du challenge. En effet, le père de famille, Eric, 52 ans, est parti vivre en Suisse pour travailler. François (22 ans) kote à Bruxelles pour les besoins de ses études de théâtre. Louis, 17 ans, est en internat à Namur.
La maison familiale se trouve à Gosselies. “Je n’y vis en semaine qu’avec ma fille aînée, Marie, qui a 25 ans”, sourit Laurence Demanet, la mère de famille. Les hommes de la famille ne reviennent que les week-ends. Eric reprend sa voiture vendredi après sa journée de travail et rejoint la maison familiale.
Les samedi et dimanche, c’est le branle-bas de combat. “On fait les courses, les lessives, les repas à reprendre…”, expliquent mère et fille. Le dimanche midi, il est déjà temps pour Eric de reprendre la route vers la Suisse.
La vie de famille tranquille a été bouleversée par le licenciement d’Eric : “Il a été licencié pour raison économique il y a trois ans par la société pour qui il avait travaillé durant 16 ans”.
Sans emploi, jugé trop expérimenté, Eric galère à trouver un nouvel emploi. “Je coûte cher à un potentiel nouvel employeur”, dit-il. Le salut viendra de Suisse. Une entreprise intéressée par son profil l’a contacté. Dix jours plus tard, il partait pour la Suisse. Au début, ce sont des petites missions. Il est désormais engagé. “Je suis sous CDI depuis le mois de janvier.”
“Les gens pensent que je gagne bien ma vie”, explique le père de famille. “Sans doute que mon salaire est important, mais je le dépense bien. En effet, je dépense 1.500 euros pour la voiture tous les mois, 1.000 euros par mois pour mon logement (une chambre dans un AirBnB), 500 euros mensuels forfaitaires pour une assurance-maladie…” A cela s’ajoutent le prix des kots, des courses… et des appels téléphoniques. “J’ai gardé mon numéro belge, quand j’appelle, je paie 3 euros/minute. Quand on m’appelle, c’est 2 euros/minute.”
Et des investissements sérieux pour la voiture. “J’en ai changé récemment pour la route. Je ne pouvais pas changer le nombre de kilomètres ni le temps, la seule chose sur laquelle j’avais une emprise, c’était le véhicule. J’ai gagné en confort. Je me sens mieux et c’est important pour la route.”
Le bonheur de la famille se ressent. “Je suis heureux et ça ne se monnaie pas le fait d’être heureux !”,nous dit-il. “Je m’appuie beaucoup sur ma femme. Les enfants sont grands, ce qui a permis cette vie. Avec ma femme, maintenant, on se rencontre souvent dans les hôtels”, dit-il.
Laurence le rejoint dès qu’elle peut : “Je prends l’avion et je passe le week-end avec lui là-bas, ou en Italie, chez sa maman.” Pour elle, le plus difficile est la vie sociale qui n’est plus que l’ombre de ce qu’elle était. “Nous étions fort investis dans différentes associations, surtout mon mari. Aujourd’hui, il est toujours engagé, mais à distance. Le week-end, il nous est presque impossible d’être invité ou d’inviter des personnes. On doit quitter tôt ou pousser les personnes à partir tôt le samedi soir parce qu’Eric doit reprendre la route le lendemain à 14 heures et le réveil sonne à 9 heures. On ne peut plus faire de repas de famille le dimanche midi, ou alors il doit prendre congé.”
Au quotidien, "ce n’est pas le plus difficile à vivre. Heureusement, nous avons la technologie. Nous n’avons pas un quotidien toujours facile, mais il y a des cas plus critiques, plus graves !”
Elever ses enfants seuls n’a pas été son unique souci ces dix dernières années. Sa famille vivait à La Plante (Namur) avant d’être expulsée pour fin de contrat de bail et expulsion. Trois années durant, ils ont vécu dans la rue. “On a habité dans des tentes, puis dans un squat près de Namur. Les autorités nous ont chassés de ce squat il y a trois ans pour nous amener ici à Jemeppe-sur-Sambre, dans un logement social fourni par le Foyer Taminois. Je ne souhaite à personne de vivre ce que j’ai vécu”, témoigne Georges.
À l’heure actuelle, le père de famille vit dans ce logement social avec sept de ses enfants, les autres ayant déjà quitté le nid familial. Aux soucis de logement se sont ajouté des problèmes financiers. Le chef de famille ne travaille plus depuis presque trois ans. Il voulait avoir le temps d’ "élever correctement les enfants et être là pour eux”. Mais sans travail, les fins de mois sont difficiles à boucler. Georges explique sa situation : “J’ai dû vendre tous les objets en or pour les trois mariages de mes enfants. Je dors dans le salon. La maison est trop petite, je veux laisser les chambres à mes enfants. Et pas de vacances possibles. Enfin, si, parfois on prend des tentes et on va passer quelque temps à Namêche”.
Malgré tous les problèmes rencontrés, la famille Mathieu fait face et continue à avancer ensemble. Leur motivation ? “La famille bien sûr ! On sera toujours là les uns pour les autres et on se soutient. Un homme est fort, mais une famille encore plus”.
M. Deb.