1969:
et Dieu créa
le Cannibale


Empreint de nostalgie, le sport belge cultive ses souvenirs.
1969, fut une année héroïque, d'abord classée Ickx, avec le victoire de Jacky aux 24H du Mans. Mais au sein du peloton de nos souvenances,
la première victoire d’Eddy Merckx sur les
routes du Tour de France occupe le maillot jaune…
Le 20 juillet 1969, à 21h17 (heure belge), Apollo XI se
posait sur la lune. Quelques heures plus tôt, Eddy
Merckx marchait sur le 56e Tour de France. Alors néophyte
de la Grande Boucle, le plus grand coureur cycliste de tous les
temps avait déjà aiguisé son appétit
cannibalesque, en avalant trois Primavera,
un Paris-Roubaix, un Ronde,
une Doyenne, un Giro et un Mondial,
notamment, mais c’est véritablement
lors de ce Tour 69 que la légende
Merckx vit le jour. Pour la génération
des plus de 50 ans, qui ont grandi au
rythme de ses coups de pédale, pour les personnes
entrées dans leur deuxième demi-siècle, qui ont vibré
aux innombrables exploits du champion, Monsieur
Eddy reste la référence suprême d’une Belgique
qui gagne.
Ce vendredi, il y a 50 ans donc, le Tour de
France de 1969 prenait son envol de Roubaix. Nous
retraçons dans ce long format la fabuleuse épopée
d’Eddy Merckx, avec une pointe de nostalgie teintée
de fierté. En espérant un jour revivre pareilles émotions,
avec un Belge roi du peloton...

Le 28 juin 1969, il y a 50 ans, le 56e Tour de France prenait son envol de Roubaix. 4.117 km et 22 étapes plus tard, Eddy Merckx remportait la première de ses cinq Grandes Boucles. Le mythe était né. Évocation d’un des grands moments du sport belge…
Extraits du livre de Joël Godaert
Eddy Merckx
La roue de la fortune
Du champion à l’homme d’affaires,
paru aux Éditions GammaSport

Roubaix, 28 juin 1969

Eddy plaisante avec Jan Janssens avant le départ du Tour à Roubaix.
Eddy plaisante avec Jan Janssens avant le départ du Tour à Roubaix.
Samedi 28 juin 1969, à Roubaix. Coureurs, suiveurs, journalistes et public s’interrogent. Quelle mouche a piqué Eddy Merckx ? Pourquoi s’élance-t-il le premier dans le prologue du Tour de France ? Tactiquement, le choix paraît absurde et peu conforme à l’intelligence de la course que l’on prête, déjà, au jeune Merckx, 24 ans à peine. Généralement, le coureur et son directeur sportif conviennent ensemble qu’il est plus judicieux de partir parmi les derniers. Car il est évident que le premier coureur à s’élancer dans une manche chronométrée individuellement, est handicapé par rapport à ceux qui le suivent. Il ne dispose d’aucun point de repère, il ne peut pas nourrir l’ambition de revenir sur celui qui le précède – ce qui constitue, souvent, un avantage non négligeable –, il n’a d’autre ressource que de foncer, seul, dans le vide. Et voilà qu’Eddy Merckx, grand favori du Tour de France 1969 opte pour la difficulté. Il aurait pu être parmi les derniers à courir, il est le tout premier à aborder ce prologue de 10 km 400. “C’est Driessens qui l’avait décidé ainsi. J’ai accepté. C’est tout.”
Merckx ne sait toujours pas pourquoi son directeur sportif prit cette décision et, surtout, pourquoi lui-même ne protesta point. Précisons que les organisateurs du Tour avaient procédé à un tirage au sort de l’ordre des départs des équipes, les coureurs étant librement répartis par leurs directeurs sportifs dans chacune des treize séries (il y avait treize équipes alignées dans ce Tour 69) de dix ainsi composées. Faema, la formation d’Eddy, avait hérité du numéro 1. N’est-ce pas, précisément, parce que Driessens devait désigner le coureur chargé d’ouvrir la route, qu’il lança Merckx en tête ? Ses déclarations de l’époque semblent le démontrer. Guillaume Driessens avait accueilli reproches et interrogations du haussement d’épaules dont il est coutumier : “Le plus tôt était le mieux, Eddy serait tranquille d’autant plus vite, les conditions climatiques étaient bonnes, le monde et les importuns en nombre réduits.”
Pas réellement convaincant ! Car un vent gênant avait perturbé Merckx dans la deuxième partie de la course alors qu’il ne soufflait plus en fin d’épreuve. Le phénomène est relativement fréquent et fausse parfois le jugement chiffré d’une telle étape disputée contre le chronomètre. Et le départ d’Eddy avait dû être retardé de cinq bonnes minutes, la chaussée n’étant pas suffisamment dégagée. Merckx était grimpé sur l’aire de lancement, puis redescendu de machine, avant d’obtenir, enfin, le feu vert. Nerveux plus que jamais, il s’était alors élancé à folle allure, comme pour se défouler, accusant une pointe de fatigue avant le terme de son prologue. Bilan ? Il n’était que deuxième et échouait à six secondes et quarante centièmes d’Altig, le vainqueur. Si Eddy était parti dans les derniers, il aurait comblé ce léger retard sur l’Allemand et aurait été vêtu de jaune à l’issue de cette première journée du Tour, ainsi que la Belgique entière en rêvait depuis longtemps.
“J’étais un rien déçu, mais je ne l’ai pas laissé paraître. J’étais demeuré sans compétition pendant plusieurs jours. Ceci constituait un réel handicap pour une épreuve de ce genre.”
Trois semaines plus tard, Merckx était le dernier à pénétrer sur le vélodrome de Vincennes. Cette fois, il avait le maillot jaune bien accroché sur les épaules. Il venait l’offrir à ces milliers de Belges qui patientaient depuis trente ans. Il avait gagné le Tour de France, après l’avoir archi-dominé. Le premier à partir à Roubaix était, aussi, le premier à Paris !
La révélation au Giro 68
Alors que son palmarès s’était enrichi au fil des saisons de succès et d’exploits multiples, les uns plus remarquables que les autres, Eddy Merckx confiait longtemps après : “De toutes mes victoires, mon premier Tour de France demeure la plus belle.”
Aujourd’hui, Eddy persiste et signe : “C’est vrai, cela n’a pas changé. Cela a été la plus belle, celle qui m’a valu le plus de plaisir. Indéniablement, ce premier Tour de France m’a procuré une joie intense qui demeure intacte, quarante ans plus tard. J’ai concrétisé un rêve de gosse. Quand j’étais gamin et que je roulais dans les rues de Woluwe-Saint-Pierre avec mes camarades. Je les devançais régulièrement, je songeais déjà au Tour de France. Je me voyais endosser le maillot jaune. Chaque coureur n’entretient-il pas le même rêve ?”
Mais fort peu, évidemment, parviennent à le concrétiser. Merckx a gagné tant de courses que son attachement pour cette victoire dans le Tour 69 n’en a que plus de valeur et plus de sincérité. À ses yeux, comme à ceux de tous les sportifs, le Tour de France est l’événement exceptionnel que l’on place, obligatoirement, au-dessus de tous les autres, au niveau de la Coupe du Monde de football ou des Jeux Olympiques.
Un coureur cycliste peut enlever le titre mondial sur la route, il peut remporter une classique. Mais triompher dans le Tour, c’est tout différent encore. Le Tour reste un monument dans le sport cycliste, rien ne peut lui être comparé.
En 1969, quand Merckx s’imposa, il mettait un terme à pas mal d’années d’insuccès pour les Belges. Sa victoire n’en avait que plus de prix. Pourtant, un an plus tôt, un compatriote, Herman Vanspringel, avait bien failli lui ravir cette satisfaction. Le brave Herman ne s’était incliné qu’in extremis, face au Néerlandais Jan Janssen lors de l’ultime explication chronométrée. Le dénouement du Tour 68 fut digne d’Hitchcock, encore que beaucoup pensent toujours que la régularité ne domina point les débats. Mais, comme dirait Eddy, c’est du passé...
“Si Vanspringel avait gagné, ma propre victoire n’aurait rien perdu de sa valeur : pour moi, elle serait demeurée, de toute manière, la plus belle de ma carrière. Le vainqueur du Tour de France, c’est nécessairement le meil-leur coureur du peloton, le plus complet. Les exceptions qui figurent au palmarès du Tour à ce propos sont rarissimes.”
La portée exceptionnelle qu’il accorde à son premier succès dans le Tour de France n’empêche pas Merckx d’avouer qu’il espérait, sinon qu’il prévoyait son triomphe. À l’issue de sa victoire, tout aussi nette, dans le Tour d’Italie 1968, il était convaincu qu’un jour, il achèverait le Tour vêtu de jaune.
“J’avais réellement dominé mes adversaires qui seraient pratiquement les mêmes au Tour de France. J’avais grimpé les cols comme jamais plus je n’y parviendrais. À la veille du prologue de Roubaix, j’étais certain de mon fait : je gagnerais ce Tour. Mais j’ai gardé ce sentiment pour moi. Il n’était pas dans mon caractère de claironner à tous ma supériorité. D’ailleurs, je n’ai jamais sous-estimé mes rivaux.”
Merckx aurait même pu sans doute triompher dans le Tour dès 1968. Il avait tous les atouts pour réussir. En 1983, il me confia à Morzine-Avoriaz alors que nous assistions à une arrivée du Tour : “J’avais été approché par une firme internationale pour m’aligner dans l’épreuve française dès 68. On m’a proposé un million de francs belges. J’ai refusé.”
Même la Ligue vélocipédique belge effectua des démarches pour convaincre Merckx de prendre le départ de ce Tour disputé, une dernière fois, selon la formule des équipes nationales. Engagé à l’époque dans l’équipe italienne Faema, il était obligé de courir le Giro. Et il n’était pas question qu’à 23 ans, il dispute les deux grands Tours dans la même saison : “Cela aurait été du suicide. Certes, j’aurais pu gagner, dès 1968, les deux Tours. Mais j’aurais sans doute abrégé ma carrière de quelques mois, voire de quelques années. Quand on est jeune, on ne fiche pas son avenir en l’air pour de l’argent.”

Merckx vainqueur du Giro 68.
Merckx vainqueur du Giro 68.
Eddy avait donc compris au terme du Giro 68 qu’il pouvait, l’année suivante, aborder le Tour de France en toute quiétude. Non pour apprendre, mais pour gagner. D’emblée. Au premier coup d’essai. Mais il n’avait pas acquis cette assurance tout de suite. Chez les amateurs (les Espoirs d’aujourd’hui), il n’avait disputé que le seul Tour du Limbourg, en guise de course à étapes. Il était certes devenu champion du monde à Sallanches, en 1964, mais cela ne prouvait rien encore. Combien d’amateurs, vainqueurs du titre mondial, sont devenus d’authentiques champions ? Fort peu en vérité. En 1965, Merckx passa professionnel au sein de l’équipe de Rik Van Looy qui, déclinant, n’accepta que du bout des doigts la présence du jeune Eddy. Champion lui-même, l’Empereur avait sans doute compris, avant tous les autres, que Merckx, bientôt, lui porterait ombrage. En 1966, Eddy changea donc de formation et, d’emblée, s’imposa dans Milan-Sanremo.
“Ce qui était exceptionnel, certes, mais ce qui ne m’engageait pas à croire qu’un jour, je serais vainqueur du Tour de France. Je savais seulement que dans les classiques et à condition de poursuivre dans cette voie, j’obtiendrais de bons résultats. Je n’étais pas encore certain de mes possibilités après ma victoire d’étape, au sommet du Block Haus dans le Tour d’Italie 67. Je doutais toujours de ma résistance pendant trois semaines de course.”
Puis survint le Giro de 1968. Il serait injuste, aujourd’hui, de ne pas rappeler sa superbe chevauchée du 1er juin dans l’étape des Tre Cime di Lavaredo. Il s’agissait, évidemment, d’une étape de haute montagne et le massif des Tre Cime devait constituer un tournant dans ce Tour d’Italie. La manche fut animée en deux temps. Dès le départ, diverses attaques avaient permis à une douzaine de coureurs de se dégager avant les véritables difficultés. Ils comptaient plus de neuf minutes d’avan- ce sur les favoris, dont Merckx, au pied des ultimes cols. Alors qu’une tempête de neige plongeait la caravane dans la froidure et limitait au minimum la visibilité, Merckx passa à l’offensive. Un à un, il remonta tous ceux partis dans la plaine. En douze kilomètres, il refit non seulement la totalité du retard accusé à l’origine de son assaut, mais creusa encore des écarts, jugés définitifs, sur les autres candidats à la victoire finale. Une démonstration extraordinaire qui enthousiasma chacun. Dès cet instant, on osa comparer Merckx à Coppi. Et certains déjà, parce qu’ils connaissaient les choses du cyclisme, envisagèrent que ce sport vivait un tournant important de son histoire.
Alors que la France avait vécu à l’heure de la révolution de mai 68, le cyclisme voyait la révolution de Merckx. Contrairement aux devanciers récents, les champions Jacques Anquetil et Felice Gimondi, Eddy n’attendait pas les événements, il ne spéculait pas sur des profils d’étapes. Il ne choisissait pas le moment ad hoc pour frapper, il prenait le parti de profiter de la moindre occasion qui se présentait à lui. Ce fut la principale conclusion que l’on tira, ce jour-là, à l’arrivée de l’étape des Tre Cime di Lavaredo. Conclusion sur laquelle, souvent encore, on allait revenir dans les chroniques cyclistes. Le doute n’était plus permis : Merckx était bien le champion que la Belgique attendait. Quand la saison suivante se présenta, on le désigna déjà parmi les grands favoris de l’épreuve de juillet. Tout menait au futur triomphe du jeune champion. Il gagna des courses au printemps, puis s’aligna dans le Tour d’Italie. Le tapis rouge semblait se dérouler, comme par magie devant ses roues, chacun de ses coups de pédales le rapprochant du maillot jaune du Tour.



L’affaire de Savone
Pourtant, à Savone, tout a basculé. Brutalement, l’envolée du champion a, en effet, été freinée, injustement arrêtée : “Sur le moment, j’ai eu l’impression que le ciel me tombait sur la tête.”
Convaincu de dopage à l’issue de la seizième étape, Parme - Savone, Merckx fut exclu du Tour d’Italie 69. À l’époque, le règlement était, en effet, impitoyable et n’offrait aucun moyen de défense au coureur suspecté de dopage. Non seulement la mise hors course était immédiate, mais, en plus, le cycliste était suspendu pour un mois. La catastrophe : Merckx ne pourrait pas courir le Tour de France 69 car sa suspension s’étendait jusqu’au 1er juillet alors que l’épreuve partait le 28 juin. Or, le matin même de cette funeste étape, Eddy avait ni plus ni moins déclaré : “Je me crois à l’entraînement. J’ai déjà établi mon programme pour la période d’entre les deux Tours. Je vais courir neuf fois et je serai fin prêt pour le Tour.”
Ce relatif optimisme témoignait du fait qu’Eddy était à mille lieues de se douter du drame qui se préparait. Il avait déjà gagné quatre étapes et possédait une avance confortable sur Gimondi au classement général. Même si le souvenir est cruel, les événements qui se déroulèrent à Savone, puis à Milan et, enfin, en Belgique avant le départ du Tour doivent être contés puisqu’ils dévoilent dans quel état d’esprit Merckx aborda la Grande Boucle. S’il était certain de son succès car il se savait, physiquement, plus fort que ses rivaux, sa préparation psychologique n’aurait pas pu être plus mauvaise. Théoriquement, il n’aurait pas dû courir le Tour, la décision finale ne tombant que tard.

Rarement une affaire de dopage fit couler autant d’encre à l’époque que celle de Savone, même si, depuis, d’autres affaires furent hélas ! encore plus retentissantes. Tout le monde s’en mêla, pouvoir sportif et pouvoir politique. Il y eut des interpellations au Sénat italien comme à la Chambre en Belgique. On frôla même l’incident diplomatique entre les deux pays. Pendant près d’un mois, Eddy Merckx vécut un véritable calvaire dont voici, ci-après, les principales stations.
Le dimanche 1er juin, à l’issue de l’étape Parme - Savone, Merckx se soumet au contrôle antidopage. C’est son neuvième depuis le départ du Giro.
Le lundi 2 juin, Vincenzo Giacotto, manager du groupe Faema qui emploie Merckx, est averti par un communiqué du jury de la course qu’Eddy est frappé d’une mise hors course et d’une suspension ferme d’un mois par suite du résultat positif de son examen. Merckx proteste de son innocence. Très rapidement, les mots sabotage, machination, empoisonnement et erreurs tombent. Eddy se promet de savoir. Cinquante ans plus tard, il ignore toujours.
“Deux jours avant Savone, on m’a proposé de l’argent pour que je perde le Giro. Je n’ai même pas voulu savoir combien, j’ai dit non tout de suite. Je ne puis pas dire qui était à l’origine de cette proposition absurde. Je ne sais pas si Gimondi était au courant (NdlR : Rudi Altig, à l’époque équipier de Gimondi, avait été l’auteur de cette démarche). Je ne veux plus le savoir. Je n’ai jamais su, finalement, qui m’avait piégé. Mais j’avais été bel et bien piégé. Au moment de la décision du dopage, j’ai voulu tout arrêter. C’était trop injuste. Pourquoi aurais-je pris un quelconque produit défendu en vue d’une étape totalement anodine ? Et je savais que je serais contrôlé puisque j’étais porteur du maillot rose de leader.”

Le lundi 2 juin toujours, la 17e étape du Tour d’Italie est lancée, sans son maillot rose, ni ses équipiers. Merckx et l’ensemble du groupe Faema se soumettent à un contrôle à titre privé avec pour témoins trois journalistes, l’Italien Ormezzano, le Français Seassau et le Belge René Jacobs.
“Si, à l’issue de ce nouveau contrôle, j’avais été reconnu positif, il ne fait aucun doute que Faema m’aurait licencié. Mais ce ne fut évidemment pas le cas. Puisque je n’avais rien pris.”
Le mardi 3 juin, le président de la Ligue vélocipédique belge, M. Moyson, arrive à Milan où Merckx et son épouse l’accueillent. Ils ont une réunion avec M. Rodoni, président de l’Union ycliste internationale. Celui-ci promet une enquête.
De son côté, Félix Lévitan, qui craint pour l’intérêt de son Tour de France, estime que la Fédération “s’honorerait en accordant une remise de peine de trois jours à Eddy Merckx afin de lui permettre de prendre le départ du Tour.” Le patron de la Grande Boucle précise qu’il n’est pas possible, pour des raisons matérielles, de décaler son épreuve comme certains l’espéraient. Entre-temps, le nom du produit qu’aurait utilisé Merckx est révélé. Il s’agit du Réactivan-Merck.
Felice Gimondi aurait été pris avec ce même produit l’année précédente, toujours au Giro. Mais ce ne fut qu’après l’arrivée finale de l’épreuve qu’on divulgua le résultat de l’analyse
Le jeudi 5 juin, Merckx, rentré en Belgique, est reçu au siège de la LVB, puis par les ministres Parisis et Van Mechelen. L’affaire a définitivement pris des proportions politiques. La veille, M. Parisis avait envoyé au président de la Fédération italienne de cyclisme le message suivant :

”Monsieur le Président,
Je vous adresse cette lettre pour vous dire l’émotion qui a saisi les deux ministres belges de la Culture ainsi que l’opinion publique en apprenant le pénible événement survenu à notre compatriote Eddy Merckx. Vous n’ignorez certainement pas que la presse belge a porté à la première page de tous les journaux cette incroyable nouvelle : Eddy Merckx dopé ? Ceci nous paraît extraordinaire, connaissant la probité du coureur. Aussi, la pleine lumière devra être faite à ce sujet. Nous comptons, bien entendu, sur votre diligence et votre dévouement à la cause du sport pour que ceci se fasse.”
On apprend, dans la soirée, que les analyses effectuées à l’initiative des dirigeants de Faema sont toutes négatives. Par contre, curieusement, les pièces à conviction, soit les flacons utilisés lors de la première analyse, ont disparu.
Le vendredi 6 juin, alors que l’enquête de Rodoni piétine, M. Moyson demande une nouvelle fois des éclaircissements à propos de la procédure suivie lors du contrôle de Savone.
Le lundi 9 juin, le secrétariat de la Fédération internationale du cyclisme professionnel (FICP) communique à la Ligue vélocipédique belge (LVB) le télégramme officiel reçu de la part de la Fédération italienne : “Communiquons coureur Eddy Merckx suspendu du 2 juin au 1er juillet 1969. État positif examen dopage seizième étape Tour d’Italie.”
La LVB se pourvoit immédiatement en appel contre cette décision. La sanction est ainsi suspendue et Merckx a le droit de courir à nouveau.
Le mardi 10 juin, Merckx effectue sa première sortie d’entraînement.
“Le plus pénible était l’incertitude : allais-je ou non pouvoir courir le Tour de France ? Un jour, tout le monde y croyait, le lendemain, l’espoir diminuait à nouveau. Quand j’ai repris l’entraînement, j’ai voulu y croire. Pendant cette période-là, je parcourais 220 km deux à trois fois par semaine dans le sillage de Guillaume Michiels.”
Seul contre tous
Le mercredi 11 juin, le président Rodoni effectue une brutale marche arrière qui lui vaudra à jamais le surnom de Judas. Il classe l’affaire sans suite à l’issue de son enquête personnelle.
Le samedi 14 juin, lors d’une réunion extraordinaire, le comité directeur de la FICP accepte l’appel de la LVB et blanchit Merckx au bénéfice du doute. Averti par téléphone, Eddy n’a pas bondi de joie comme on pourrait le croire. Il a commencé par dire : “Pourquoi parle-t-on de doute ? Il n’y a pas de doute puisque je ne me suis pas dopé. Il fallait dire que j’étais innocent. Enfin, je suis content tout de même !”
On a expliqué ensuite que deux éléments avaient fait pencher la balance en faveur de Merckx. D’une part, le résultat négatif de la contre-analyse à laquelle il s’était soumis ainsi que ses équipiers à Milan. D’autre part, une expérience qu’il accepta également et à laquelle on procéda dans un laboratoire de Gand. Merckx avait volontairement pris du Reactivan. Tant la première analyse que la seconde, effectuée quarante-huit heures plus tard, s’avérèrent positives. Ce qui donnait évidemment davantage de poids au contrôle de Milan et permettait de douter de celui de Savone qui avait tout déclenché.

Mais, en ce samedi 14, l’important est que la suspension soit levée, qu’Eddy disputera le Tour de France. Le soulagement est général et, pourtant, certains ne sont pas heureux.
“La plupart des réactions furent bonnes. Quelques coureurs eurent cependant une attitude négative. Ils disaient que la loi devait être la même pour tous. C’était logique. Je me souviens même que Jos Huysmans n’était pas d’accord avec cette décision, mais il n’était pas encore mon équipier à l’époque.”
D’autres coureurs, comme Jan Janssen ou Raymond Delisle sont carrément furieux. Il est vrai qu’ils ont subi des suspensions dans les douze mois qui ont précédé l’affaire et que malgré leurs protestations, ils ne furent pas, eux, entendus. À partir de ce moment, Merckx met les bouchées doubles. Il dispute un critérium à Caen, une épreuve à Bruges. À chaque fois, le public l’accueille triomphalement. Mais il n’est pas encore au bout de ses peines.
Le vendredi 20 juin, la Fédération cycliste italienne annonce qu’elle va en appel de la décision prise le samedi précédent à Bruxelles par la FICP et le groupement des équipes italiennes ajoute à la confusion en précisant qu’aucune de leurs formations ne disputera le Tour au cas où Merckx serait admis au départ ! Même la fédération néerlandaise emboîte le pas de sa consœur italienne, ce qui témoigne qu’Eddy, à l’âge de 24 ans, avait déjà fait beaucoup de jaloux.
“Il y en a toujours eu et au fil de mes victoires, leur peloton a grossi. J’ai entendu pas mal de méchancetés sur mon compte. On a ainsi prétendu que j’étais un vrai pharmacien (NdlR : le frère d’Eddy a fait des études en pharmacie) et que je profitais abondamment de mes connaissances. Quand on demeure treize années au sommet, ce n’est pas parce qu’on est pharmacien. Si j’avais abusé de produits dopants, jamais je n’aurais été aussi loin.”
Le dimanche 22 juin, le championnat de Belgique sur route couronne le jeune Roger De Vlaeminck. Merckx termine 32e, très éprouvé physiquement. Les 258 km l’ont fatigué et, surtout, il s’est blessé en heurtant du genou gauche la manette du dérailleur.
Le lundi 23 juin, enfin, les journaux peuvent titrer : “C’est réglé !”

Merckx au Tour lors du départ à Woluwé.
Merckx au Tour lors du départ à Woluwé.
La bombe éclatée le vendredi soir est désamorcée. On parle de mauvaises interprétations, de traductions erronées. Il est vrai que depuis trois semaines, on ne s’est plus très bien compris entre la Belgique et l’Italie. Finalement, il n’y a pas d’appel contre la décision de la FICP.. Merckx reste blanchi et il peut, enfin, songer très sérieusement au maillot jaune. Lorsqu’il apprit la nouvelle, il était en train de remporter la course d’Ottignies en solitaire. Le genou ne lui faisait plus mal, il avait retrouvé, à quelques jours du départ pour Roubaix, l’envie de vaincre et de se surpasser.
Battu d’un fifrelin par Rudi Altig dans le prologue de Roubaix, Merckx avait endossé le précieux maillot jaune dès le deuxième jour de course, quand celle-ci pénétra, chez lui, à Woluwe-Saint-Pierre. Mais le lendemain, à Maastricht, il l’avait cédé à son propre équipier, Julien Stevens. Tant en Belgique qu’en Hollande, les supporters s’étaient montrés particulièrement enthousiastes, chacun insistant sur leur fair-play. Jan Janssen, qui n’avait pas caché ses sentiments à propos de la levée de la suspension de Merckx, avait essuyé quelques sifflets à Bruxelles. À Maastricht, le vainqueur du Tour 68 concluait : “Vous voyez les supporters hollandais ? Ils sont moins chauvins que les Belges. Ils n’ont pas sifflé Merckx, eux !”

Avec ses supporters belges.
Avec ses supporters belges.
Très vite, on allait se rendre compte qu’Eddy était en bagarre avec la quasi-totalité du peloton. Un jour, c’était Gimondi qui balançait l’une ou l’autre gentillesse à l’adresse du champion, le lendemain, c’était Poulidor, puis Pingeon. À chaque fois, le battu du jour crachait son venin, alors que celui qui avait eu l’immense avantage d’accompagner Merckx dans l’une de ses folles randonnées, ne tarissait pas d’éloges à son propos.
“J’avais vite compris que tous roulaient contre moi. Et j’avoue avoir eu peur de perdre jusqu’à l’ultime étape. Encore que sur la fin du Tour, je ne craignais plus tellement mes adversaires, mais davantage une chute ou une maladie.”

Avec son équipe lors du chrono contre-la-montre par équipes de Woluwé.
Avec son équipe lors du chrono contre-la-montre par équipes de Woluwé.
Merckx écrasa littéralement ses rivaux par son insolente supériorité, alliant le panache à l’efficacité, récoltant, à la moindre occasion, des secondes et des minutes d’avance. Il est amusant de constater à ce propos que, pendant le Tour, il faisait preuve de réserve et dévoilait rarement ses sentiments. Ainsi, au terme de la première grande étape des Alpes, alors que Roger Pingeon l’avait devancé au sprint à Chamonix, les réponses qu’il fit au journal Les Sports (NdlR : pas encore attaché à la DH) témoignaient d’une prudence extrême, pas réellement proche de la réalité.
“Si l’occasion s’en présentait, essayerais-tu d’humilier tes adversaires ?”
“Alors là, je suis formel : pas du tout ! Cela me servirait à quoi d’avoir un quart d’heure d’avance ? Je n’ai aucune raison de me mettre tout le monde à dos.”
“Tu vas donc faire la course sur la défensive ?”
”Oui. Je vais être le plus attentif possible. Au fond, je suis dans la position de l’équipe de football qui mène largement à la marque et qui mise sur la prudence.”
Dialogue qui contraste résolument avec ce qui se déroula sur le terrain, autant qu’avec une déclaration prononcée vingt ans après. Rappelons qu’Eddy triompha à Paris avec 17 minutes et 54 secondes d’avance sur le deuxième, Pingeon, alors que Poulidor, troisième, accusait plus de 22 minutes de retard !
“Chaque fois que j’avais l’occasion de prendre du terrain sur mes rivaux, je n’hésitais pas une seconde. Qu’il s’agisse d’un gain de vingt secondes ou de cinq minutes.”
Voilà qui correspond mieux à la vérité sportive. Mais il est assurément plus aisé pour Merckx de parler ainsi aujourd’hui. Le recul du temps a atténué les effets de l’anxiété qui l’habitait à l’époque.
“Je n’ai jamais eu l’impression, dans ce Tour, que j’en faisais trop, que je prenais des risques”

Le Mao jaune
Merckx n’a donc fait de cadeau à personne dans ce Tour 69. Même pas à Rik Van Looy, contrairement à ce qui a été dit et écrit à Nancy. L’Empereur, au crépuscule d’une carrière exceptionnelle, était parvenu au prix d’une longue et éprouvante échappée en solitaire à remporter l’étape. Huit hommes s’étaient dégagés du peloton à sa poursuite mais s’ils avaient comblé une grosse partie de leur retard, ils n’avaient pas réussi à rejoindre Van Looy. Comme s’ils ne l’avaient pas franchement voulu.
“Je m’inscris en faux contre cette manière de considérer les événements. Je n’ai jamais fait la moindre concession à Van Looy. D’ailleurs, il ne m’avait guère facilité les choses à mes débuts chez les professionnels et je n’avais aucune raison de lui être agréable.”

Van Looy et Merckx.
Van Looy et Merckx.
Merckx n’évoque pas le cas de Julien Stevens, véritable plaque tournante de cette étape. Stevens était vêtu de jaune quand, derrière Van Looy, échappé depuis belle lurette, il osa une contre-attaque. Mais il ne mena pas à fond au sein de son petit commando et Van Looy triompha. À l’arrivée, Stevens déclara, sibyllin : “Si j’avais été jusqu’au bout, Van Looy aurait été rejoint. Je ne l’ai pas fait pour deux raisons. L’une tactique, l’autre sentimentale. D’une part, il y avait parmi nous l’Italien Zandegu, un redoutable sprinter. De l’autre, je préférais la victoire de Van Looy. Je suis belge, non ?”
Assurément, mais Stevens était surtout un ex-équipier de l’Empereur d’Herentals Merckx, lui, constata ce jour-là : “Je n’étais pas du tout au courant de cet assaut de Stevens et je n’ai pas à me prononcer sur son intérêt.”
En clair, cela signifie : je ne suis pas d’accord avec cette manière d’agir mais je ne tiens pas à envenimer les choses. Merckx avait déjà suffisamment de problèmes avec ses rivaux pour ne pas avoir à se préoccuper des états d’âme de ses équipiers. Il ne s’intéressa pas davantage au pugilat qui, au cours de la même journée, opposa l’Espagnol Perez-Frances au Néerlandais René Pijnen. Le futur patron des épreuves de six jours fut envoyé par deux fois au fossé par son rival. Curieusement, Perez-Frances, le boxeur, avait hérité la veille du titre de coureur le plus élégant du Tour.
Merckx porta son premier coup décisif le jour du Ballon d’Alsace. Il élimina très vite ses principaux rivaux, dont Poulidor, Gimondi et Pingeon, et n’accepta que la présence de l’Espagnol Galera, d’Altig et de De Vlaeminck, ces deux derniers livrant un véritable baroud d’honneur. Comprenons : une ultime bataille que, physiquement, ils ne digérèrent jamais. Ce jour-là, on parla dans la caravane de complexe Merckx. Et les journalistes qui envisageaient la trop nette domination du champion inventèrent les termes de Merckxisme (ou l’art de l’attaque) et de Merckxomatose (ou la maladie anti-Merckx). À l’issue de ce Tour, l’écrivain français Antoine Blondin, qui cultivait le jeu de mots, titrait à propos de la révolution merckxiste : Le Mao jaune.
“Dès l’étape du Ballon d’Alsace, j’étais très confiant pour la suite de la course. J’avais bien grimpé, j’étais à l’aise. Je savais déjà que j’allais gagner le Tour, mais je n’ai rien laissé paraître.”

Merckx dans le Ballon d'Alsace.
Merckx dans le Ballon d'Alsace.
Tout au long des trois semaines de course, Eddy répéta que rien n’était fini, que la course ne s’achèverait qu’à Paris, à l’ultime ligne blanche. Il se méfiait de tout et de tout le monde. Et personne ne le ménagea, en particulier ses rivaux. Au Ballon d’Alsace, même Raymond Poulidor, le gentil Poupou, utilisa deux langages. D’un côté, il admettait sportivement la supériorité évidente d’Eddy; de l’autre, il regrettait que le vainqueur du jour se soit permis d’attaquer alors qu’il était à l’arrêt, victime d’ennuis mécaniques : “Merckx n’est pas correct. Il a lancé son offensive alors que Gimondi avait crevé et que moi-même, je connaissais des problèmes de dérailleur.”
Si certains versèrent une larme pour le malheureux Poupou, fidèle à son image de chien battu, peu tombèrent dans le piège. En Alsace encore, Merckx sollicita d’être contrôlé quotidiennement, histoire de démonter le traquenard de Savone. Deux jours plus tard, on apprenait que des cas de contrôle positif seraient prochainement révélés. En cause : Altig, Timmermann, Nijdam ou encore Matignon qui, après sa pénalisation depuis l’affaire de Merckx au Giro, la mise hors course avait été remplacée par une amende en temps, devait triompher au sommet du Puy de Dôme.
“Oui, j’ai proposé au Docteur Dumas, responsable du service médical, de me rendre tous les jours au contrôle, même lorsque je n’y étais pas prié. Je voulais que les choses soient claires.”
Et tu ne craignais rien ?
“On a toujours une certaine appréhension. En fait, on n’est jamais sûr mais je prenais pas mal de précautions à l’époque. Je refusais d’accepter des bidons sur le bord de la route, je me méfiais de tout et de tous.”
La seule pénalité qui frappa Eddy au cours de cette Grande Boucle fut une amende de 100 francs français : il avait abusivement réduit son dossard, faisant ainsi disparaître, sans doute, le nom d’un des grands sponsors du Tour...
Dans les Alpes, les journalistes qui avaient donné la préférence à Gimondi au moment de formuler leur pronostic au départ du Tour durent se rendre à l’évidence : Merckx était intouchable. À Chamonix, il piégea tous ses rivaux, à l’exception de Pingeon qui enlevait l’étape. Le même Pingeon fut durement contré par Merckx dans le col d’Allos, Eddy s’imposant à Digne. Et le lendemain, à Aubagne, Pingeon accusa à nouveau du retard, alors que Gimondi, enfin souriant, remportait la manche. À chaque fois, Merckx prenait de l’avance sur ses adversaires directs.
“Ai-je connu un mauvais jour sur ce Tour ? Vraiment, j’en doute. À cette époque, les mauvais jours, je ne savais pas trop ce que c’était. Au Giro 1968, malgré ma domination, j’avais connu un gros moment de frayeur. Une nuit, j’étais tombé malade, j’avais eu jusqu’à 38° de fièvre. Le lendemain matin, je n’étais pas encore très frais. Et pourtant, ce jour-là, j’ai gagné l’étape. Mais au Tour de 69, non, vraiment, je ne me souviens pas d’une mauvaise journée. Peut-être à Chamonix quand Pingeon m’a battu au sprint. En fin d’étape, j’avais souffert de crampes. Cela provenait des nouvelles manivelles que j’utilisais et auxquelles je n’étais pas encore habitué. Cette fois, Pingeon aurait peut-être pu me reprendre du terrain.”

Pingeon dans la roue de Merckx.
Pingeon dans la roue de Merckx.
Mais, finalement, ce mauvais jour a été très profitable à Eddy. Seul Pingeon était parvenu à faire jeu égal. Tous les autres avaient perdu du temps. Alors que son équipier Guido Reybrouck avait triomphé à La Grande Motte, étape en partie neutralisée en raison d’un fort mistral, Eddy, lui, songeait aux Pyrénées. Ses adversaires le croyaient-ils encore vulnérable ? Ce n’est pas sûr, même si certains essayaient de s’en convaincre. On prétendait dans la caravane que Merckx connaîtrait des défaillances. Ainsi, le directeur sportif français Maurice De Muer expliquait que tôt ou tard, le Belge payerait les efforts fournis dans la chaleur. Or un coureur en forme supporte, précisément, mieux que tous les autres les conditions climatiques changeantes. Et la chaleur pas plus que le froid n’avaient de prise sur Merckx à l’époque. Au contraire...
La chevauchée fantastique
S’il avait, très logiquement, triomphé à Revel contre la montre, Merckx ne s’attendait sans doute pas à signer l’extraordinaire performance qu’il réalisa dans la grande étape pyrénéenne entre Luchon et Mourenx : une étape d’anthologie. Elle figure parmi les plus grands exploits de toute l’histoire du cyclisme. En 1968, à l’issue de sa fabuleuse étape des Tre Cime di Lavaredo, on avait titré : Merckx comme Coppi.

Dans l'étape de Mourenx.
Dans l'étape de Mourenx.
À Mourenx, les journalistes jugèrent qu’il avait rejoint le grand champion italien. Le dépassa-t-il ensuite ? C’est probable; dans les performances et les victoires, c’est même certain. On se refuse à comparer les grands champions qui marquèrent, respectivement, leurs époques car s’il est facile de comptabiliser leurs succès et de placer côte à côte leur palmarès, l’opposition qu’ils eurent à combattre demeure insondable.
L’assaut amorcé par Merckx en fin d’ascension du Tourmalet, la longue et prodigieuse cavalcade qu’il s’imposa ensuite et le gain de près de huit minutes récolté à l’arrivée, tout cela était d’autant plus beau et plus pur qu’en réalité, ce n’était nullement indispensable. Merckx n’avait plus besoin, à ce stade du Tour de France, de se donner de cette manière, il pouvait se contenter de surveiller des adversaires dont on devinait qu’ils étaient résignés. Son maillot jaune n’était plus en péril, il pouvait songer à une remontée tranquille et triomphale vers Paris. Mais Merckx n’aurait pas été Merckx s’il avait agi de la sorte.

Au lendemain de cette superbe envolée, le journal Les Sports, comme tant d’autres quotidiens, tirait : Merckx rejoint Coppi dans la légende du cyclisme, et reprenait aussi la conclusion lapidaire de l’ancien champion français, René Vietto, roi des Pyrénées autrefois qui, ce jour-là, avait suivi l’étape : “C’est un champion !” Qu’ajouter de plus ? Les journalistes étaient en mal de qualificatifs pour définir l’exploit d’Eddy.
À l’époque cependant, on n’a pas su ce qui avait motivé Merckx. Il avait évidemment escaladé les deux premiers cols de la journée, le Peyresourde et l’Aspin, en tête du peloton mais ne semblait pas, alors, animé de la moindre envie offensive. Alors que Gimondi, souffrant, était en difficulté, le début du peloton entama sagement l’ascension du Tourmalet, autre grand seigneur du Tour de France qui hérita, comme le Galibier, du surnom de juge de paix du Tour. À deux cents mètres du sommet, brusquement, Eddy se dressa sur ses pédales, accéléra, lâcha ses derniers compagnons.
“Il a sans doute voulu franchir ce célèbre col en tête, comme il était passé premier au sommet du Galibier”, jugea-t-on ce jour-là.
Mais pourquoi aborda-t-il alors la descente, pourtant dangereuse, avec autant de volonté ? Au bas du Tourmalet, vingt-cinq secondes le séparaient des premiers poursuivants, dont Pingeon, Poulidor et son équipier Vanden Bossche. Guillaume Driessens se porta à sa hauteur et lui conseilla d’attendre ceux-ci : “L’arrivée est encore loin, tu dois escalader l’Aubisque. Ménage-toi.”
Eddy opina de la tête comme s’il partageait l’avis de son directeur sportif. Il se ravitailla et roula, apparemment, sans forcer. Mais plusieurs kilomètres plus tard, on vint le prévenir que son avance avait grimpé à 55 secondes. Derrière lui, on ne cherchait visiblement pas à le rejoindre trop vite. Il arrive régulièrement qu’un peloton, certain de rattraper celui qui le précède, le laisse mourir à petit feu et n’essaie pas de revenir tout de suite, histoire de fatiguer l’adversaire. D’autre part, l’étape était encore longue. Personne, sans doute, ne s’imaginait qu’on ne reverrait pas Merckx avant l’arrivée. Apprenant ce retard, Eddy resserra ses courroies de cale-pieds, se mit bien en selle et partit. Un léger sourire se dessinait sur son visage. Il avait l’air de s’amuser. Au bas de l’Aubisque, son avantage était passé à 1.15. Au Soulor, première rampe du col pyrénéen, plus de cinq minutes le séparaient de ses premiers adversaires et au sommet de l’Aubisque, l’écart était de 7.55 ! Il restait alors 70 km à parcourir, principalement en descente ou sur plat. Driessens n’osa plus intervenir. Merckx, vraisemblablement, ne l’aurait de toute manière pas écouté. Piqué à son propre jeu, il était parti pour signer un exploit de plus.
“En réalité, si j’ai attaqué dans le Tourmalet, c’est parce que j’étais sur le coup d’une déception. Martin Vanden Bossche, mon équipier, aurait bien aimé franchir ce col en tête. Mais il m’avait appris, deux jours plus tôt, qu’il me quitterait l’année suivante. Je n’appréciais guère cette attitude, ni le fait qu’alors que nous étions encore en plein Tour de France, il ait déjà pris des contacts avec une autre équipe. J’étais déçu, presque fâché. J’ai donc attaqué pour franchir le Tourmalet en tête. La suite, vous la connaissez.”
Le seul moment de panique fut suscité par une crevaison de la voiture Faema, pilotée par Driessens. Deux roues à la main, le directeur sportif d’Eddy dut faire de l’auto-stop, s’engouffra dans le véhicule de nos confrères de la Gazet van Antwerpen et se replaça dans le sillage de son leader. À Laruns, à 56 km du but, Eddy comptait huit minutes d’avance sur un premier petit peloton de coureurs qu’on ne pouvait plus, décemment, appeler des poursuivants. Mais seize bornes plus tard, six minutes et vingt secondes seulement étaient affichées par l’ardoisier. Merckx avait fléchi, c’était visible. Son coup de pédale était plus lourd, son visage n’affichait plus la même fraîcheur.
Certains ont craint, pendant quelques kilomètres, qu’il risquait de perdre tout le bénéfice de son attaque. On a même dit, à propos de ce moment de relative faiblesse, qu’Eddy avait été aux portes de l’abandon ! Pas moins. Guillaume Driessens ne s’était pas gêné pour expliquer en long et en large qu’il avait maintenu Merckx sur son vélo, que, sans lui, Eddy n’aurait jamais rallié l’arrivée. Mais on connaissaît Driessens et son sens aigu de l’exagération. Aujourd’hui, ses déclarations ne parviennent qu’à provoquer un immense éclat de rire de la part de Merckx.
“Ah ! non, vraiment, je n’ai jamais songé à l’abandon ! Je vous le jure sur ce que j’ai de plus cher. Il est vrai qu’on l’a dit, certains l’ont même écrit. On dit tant de choses. Après l’Aubisque, j’avais huit minutes d’avance. À 40 km de l’arrivée, en effet, j’ai commencé à sentir la distance dans les jambes. Je me suis ravitaillé, j’ai relâché mon effort pendant une dizaine de bornes, puis je suis reparti. À l’arrivée, je n’avais pratiquement rien perdu de l’avantage acquis à l’Aubisque.”

Exact. À Mourenx-Ville-Nouvelle, où il avait retrouvé un sourire et une fraîcheur qui ne témoignaient pas de l’effort aussi intense que prolongé fourni pendant 140 km, Merckx triompha avec près de huit minutes d’avance 7.56 exactement sur Dancelli et 7.57 sur le premier groupe et, cette fois, plus personne, même le plus chauvin des supporters de Poulidor ou de Pingeon, ne douta de la supériorité de ce Belge. La messe était dite. Définitivement. Eddy avait gagné le Tour de France 1969. Et de quelle manière !
“Je n’ai pourtant jamais eu l’impression, dans ce Tour, que j’en faisais trop, que je prenais des risques. Sauf, peut-être, le jour de cette randonnée dans les Pyrénées. Et encore.”
Quand on songe que si Martin Vanden Bossche n’avait pas émis son intention de quitter Merckx, le cyclisme aurait pu être privé de cette envolée légendaire. Bien qu’Eddy, sans doute, eût trouvé, un autre jour ou dans une autre course, un prétexte pour donner libre cours à son goût pour l’exploit. D’ailleurs, on le découvrira plus tard, il ne rata aucune occasion à ce propos...





La Brabançonne retentit cinq fois
Après les Pyrénées, chacun était donc convaincu et certains estimaient déjà que l’ère Merckx serait longue. Pronostics mais aussi plaisanteries aimables ou teintées de rosseries faisaient dès lors partie du menu quotidien. Il convenait évidemment d’alimenter la chronique jusqu’à Paris, tout en sachant que rien d’important n’était susceptible d’encore perturber cette marche solennelle d’Eddy. Ainsi, le coureur Raymond Riotte expliqua-t-il à sa manière, la supériorité du champion bruxellois : “Que voulez-vous, Merckx bénéficie de davantage d’heures de sommeil que nous. À chaque fois que nous arrivons à l’étape, il est déjà couché depuis une demi-heure !”
Moins appréciée par le maillot jaune, cette réflexion du Docteur de la Fédération belge, Marlier, qui vint le trouver dans sa chambre à trois jours de la fin : “Je viens d’avoir le résultat de ton analyse à Mourenx-Ville-Nouvelle, il est négatif.”
Plaisanterie d’un goût douteux. Après l’affaire de Savone, le dopage était un sujet qui ne parvenait évidemment pas à dérider le moins du monde Eddy. D’autant que pendant le Tour, le Docteur Maigre, médecin de l’épreuve, s’était permis quelques suppositions pour le moins gratuites. Il avait cru déceler le secret de l’extraordinaire condition physique du champion belge, laissant tomber le nom de cortisone produit qui, par la suite, devait faire des ravages dans le peloton.
“Je me demande où il a été pêcher cela”, s’était exclamé Merckx, furieux. “Je sais qu’ensuite, le Docteur Maigre a démenti, il n’empêche que je déteste que mon nom ait été mêlé à cette histoire. Si je dispose d’une condition physique exemplaire, c’est tout bonnement parce que je soigne ma santé douze mois sur douze.”

À quelques jours de l’arrivée, on ne tenait plus en place en Belgique. Le jeudi, on annonçait qu’un train spécial quitterait Bruxelles pour Paris. Le lendemain, il apparaissait qu’un deuxième convoi serait nécessaire et le samedi matin avant l’apothéose, les journaux prévenaient que les trois trains spéciaux étaient d’ores et déjà bondés. Le vélodrome de la Cipale où s’achevait le Tour allait vivre à l’heure belge.
“Les supporters belges qui ont acheté à gros prix des places assises pour l’arrivée du Tour ont commis une erreur”, précisa Les Sports. “Compte tenu que la Brabançonne retentira à cinq reprises (NdlR : Merckx ayant trusté les différents classements et son équipe s’étant imposée également), les spectateurs assis seront très souvent debout !”
On retrouvait encore dans le même journal une déclaration de Merckx qui confirmait qu’il n’avait pas cherché, tout au long du Tour, à humilier ses adversaires.
“Si j’avais gagné avec une minute d’avance, j’aurais déjà été satisfait. Finalement, je termine avec plus d’un quart d’heure sur le deuxième. Cela témoigne seulement du fait que mes adversaires n’ont pas bien dosé leurs efforts.”
Sans commentaire. Et Merckx d’ajouter qu’en l’honneur des milliers de Belges venus l’accueillir à Vincennes, il espérait leur offrir une ultime victoire dans le contre-la-montre. “C’est vrai, je voulais gagner cette dernière étape.”
Et pourtant, Eddy faillit la perdre, il faillit même tout perdre. Était-il trop nerveux, était-ce l’angoisse de la victoire qui le paralysa ? À peine s’était-il élancé qu’il rata un premier virage, heurta la balustrade et fut déséquilibré. Mais, heureusement, il ne tomba pas. Et en vue du but, à l’entrée du vélodrome, il se trompa, partant à droite alors qu’il fallait tourner à gauche. Il perdit au minimum trente à cinquante secondes dans l’aventure, mais cela ne l’empêcha pas de laisser Poulidor, deuxième de cette manche, à près d’une minute.
“Seuls un certain stress et, surtout, une concentration extrême étaient en cause. J’avais certes seize minutes d’avance et plus rien, théoriquement, ne pouvait remettre ma victoire finale en question. J’étais tendu, nerveux, mais pas dans un état second. Hyperconcentré, je veillais à tout ce qui bougeait, au moindre piège qui était susceptible de se dresser devant moi. Et ce fut sans doute parce que j’étais à ce point obnubilé par ce que je faisais que j’ai commis ces deux petites erreurs.”
Rien donc ne fut remis en question. Et, ô surprise, quand il pénétra sur le vélodrome, Eddy esquissa un salut en direction de la foule. Ce qui ne cadrait pas vraiment avec l’attitude, réservée et empreinte de modestie qui le caractérisait généralement. Merckx était rarement démonstratif, même quand une victoire lui procurait une joie intense. Intérieurement, il jubilait; extérieurement, il paraissait parfois gêné d’avoir gagné. Mais ce jour-là, il se libéra.
“De moi-même, je n’aurais jamais songé oser ce geste. C’est Jean Van Buggenhout, mon manager, qui m’avait conseillé de remercier la foule. Il n’avait sans doute pas tort.”
Non, car Eddy, s’il était extrêmement populaire, en Belgique, bien sûr, mais à l’étranger aussi, avait principalement conquis le public grâce à ses résultats et à ses exploits. Il n’avait rien d’un cabotin, il préférait le calme de sa chambre d’hôtel au bain de foule, on le disait avare d’autographes et de sourire. Certains n’hésitaient d’ailleurs pas à lui reprocher régulièrement cette apparente froideur.
“Si je ne souriais pas plus, c’est simplement parce que j’étais concentré sur mon sujet. Au terme d’une étape, je songeais déjà à la suivante, je pensais à la tâche qui m’attendait, je calculais et j’envisageais la suite des événements. Ce ne fut qu’à Paris, après avoir franchi l’ultime ligne d’arrivée, que je me suis vraiment libéré. J’ai ressenti comme une explosion interne. Mais, jusque-là, je ne me suis jamais autorisé le moindre relâchement. Ce qui ne nous empêchait pas, au moment des repas à l’hôtel, d’entretenir une bonne ambiance au sein de l’équipe.”

Eddy et son équipe Faema.
Eddy et son équipe Faema.
Une formation Faema dont on avait écrit avant le Tour qu’elle était relativement faible, qu’elle ne serait peut-être pas capable d’épauler efficacement son leader dans les moments difficiles du Tour. À Vincennes cependant, les neuf équipiers d’Eddy étaient à ses côtés sur le podium. Aucun d’entre eux n’avait quitté la course. Faema, la seule formation terminant à Paris au complet, avait enlevé le classement par équipes et, en dehors des victoires d’étapes de Merckx, ses équipiers Stevens, Reybrouck et Spruyt s’étaient imposés.
“Je me souviens, effectivement, qu’on a douté des possibilités de mon équipe. Moi-même, j’avais en elle une totale confiance. J’avais déjà constaté au printemps, dans les classiques ainsi qu’au Giro que mes hommes étaient en forme, qu’ils étaient capables d’aborder une aussi lourde tâche que le Tour. J’avais raison et les sceptiques avaient tort. D’ailleurs, mes équipiers ne manquaient pas d’expérience et la plupart d’entre eux avaient démontré, par le passé, leur savoir-faire dans des courses à étapes de longue haleine. En réalité, à part Mintjens, j’étais le plus jeune de la formation.”
Bains de foule

Trente ans après Sylvère Maes, Merckx avait ainsi offert à la Belgique une victoire dans le Tour de France. Il avait, surtout, confirmé qu’il était bien ce superchampion que beaucoup avaient deviné en lui. Il avait ouvert, lui-même, toutes grandes les portes d’un règne. Et déjà, certains avaient peur ou se montraient jaloux, craignaient que la trop nette domination de Merckx ne provoque un désintéressement pour le sport cycliste. Mais ces défaitistes étaient minoritaires et les enthousiastes, nettement plus nombreux.
“La supériorité de Merckx ne portera ombrage qu’aux coureurs de second plan qui baisseront les bras !” estima l’ancien champion et directeur sportif, Antonin Magne.
“Le cyclisme a prospéré avec l’époque Coppi, puis à l’époque Anquetil. L’époque Merckx sera une excellente chose pour l’avenir!” surenchérit le directeur sportif italien, Giorgio Albani qui, plus tard, dirigea Eddy.
De l’avis général, le succès de Merckx prit d’autant plus une valeur indicative, que le Tour, disputé sous une chaleur accablante et sur un parcours très exigeant, avait été l’un des plus durs de l’après-guerre. Les rivaux de Merckx avaient-ils réellement une autre attitude à adopter ? Ils en convenaient eux-mêmes. Bon prophète, Raymond Poulidor affirma : “Le règne de Merckx se prolongera au-delà de 1975.”

Poulidor filme Merckx.
Poulidor filme Merckx.
Poupou voyait clair. Merckx allait révolutionner le monde cycliste et Poulidor assista, pendant de longues années encore à ce profond bouleversement. Inusable, le coureur français, alors âgé de 38 ans, était toujours aux côtés de Merckx sur le podium du Tour de France 1974. Et quelques semaines plus tard, à Montréal, il était deuxième encore derrière Eddy, vainqueur de son troisième titre de champion du monde.
On devine qu’en 1969, un tel succès avait été dignement fêté. La soirée fut très animée. Accompagné de plusieurs hommes politiques belges et de ses équipiers, Merckx avait mangé dans un grand restaurant parisien, puis était rentré en Mystère 20, l’avion ministériel, en Belgique. Il ne se souvient pas si ce fut en direct ou en différé qu’il assista au débarquement sur la lune, survenu quelques heures seulement après sa victoire. Le lundi, il était reçu par le roi Baudouin au château de Laeken.
“J’ai remis un maillot jaune au Roi. Il semblait touché par le geste et il m’a demandé si c’était un maillot que j’avais porté, car il y attacherait alors plus de prix encore. Une autre année, en 1971 je crois, je lui ai donné un de mes vélos. J’ai été très marqué par cette visite royale.”

Eddy fut aussi bouleversé par l’accueil de milliers de personnes qui lui firent la fête sur la Grand-Place de Bruxelles. Juché sur une voiture décapotable, Merckx parcourut quelques artères de la capitale et obtint un succès que peu de vedettes, avant lui, avaient récolté. Depuis, d’autres sportifs se sont succédé sur la Grand-Place, prenant un véritable bain de foule. Ce fut évidemment le cas des Diables Rouges après leurs fructueuses campagnes mondiales en 1986 et 2018 ou de Justine Henin après sa superbe victoire au tournoi de Roland-Garros.
Merckx ne l’avoua pas, mais même s’il était heureux de cet enthousiasme délirant, il vécut sans doute des heures plus pénibles après le Tour qu’au cours de son raid de Mourenx-Ville-Nouvelle.
Merckx n’a jamais cherché à distribuer les nombreux souvenirs qu’il récolta tout au long de sa carrière. Il aimait les conserver, même s’il admet qu’ils se sont entassés dans sa maison et qu’il ne retrouve pas toujours ce qu’il cherche. Un soir, alors que je discutais avec lui de ce Tour 69, il chargea son épouse Claudine de retrouver une photo de l’équipe qui l’avait entouré à l’époque. Madame Merckx remua bien des piles et des dossiers, mais la photo n’a pas été découverte...
“À mes yeux, même les fanions que je recevais dans les différentes villes où je gagnais, avaient de l’importance. Je regrette ainsi que Guillaume Driessens en ait donné un certain nombre. Mon directeur sportif s’amusait à les distribuer à ses amis, ce qui ne me plaisait déjà pas. J’aimais en disposer moi-même. Je n’ai plus mon vélo du Tour 69. Et je ne suis pas certain d’avoir plus d’un maillot rose du Tour d’Italie que j’ai pourtant remporté à cinq reprises.”

Merckx fut reçu en famille chez le Roi Baudouin.
Merckx fut reçu en famille chez le Roi Baudouin.
Heureusement, sa mémoire demeure intacte et elle conserve jalousement l’immense bonheur qu’il ressentit en remportant son premier Tour de France.

Tour de France 1969
Prologue > 28 juin
Roubaix (clm)
Classement de l’étape (10,4 km)
1. Rudi Altig (All/Salvarani) en 13.00
2. EDDY MERCKX (Faema) à 0.07
3. Charly Grosskost (Fra/Bic) 0.17
4. FERDINAND BRACKE (Peugeot) 0.18
5. Felice Gimondi (Ita/Salvarani) 0.21
Classement général
1. Rudi Altig (All/Salvarani) 13.00
2. EDDY MERCKX (Faema) à 0.07
3. Charly Grosskost (Fra/Bic) 0.17
1re étape (a) > 29 juin
Roubaix – Woluwe-St-Pierre (B)
Classement de l’étape (147 km)
1. Marino Basso (Ita/Molteni) en 3:18.29
2. Jan Janssen (P-B/Bic)
3. ROGER DE VLAEMINCK (Flandria)
4. PIETER NASSEN (Flandria)
5. EDDY MERCKX (Faema)
Classement général
1. Rudi Altig (All/Salvarani) 3:31.29
2. EDDY MERCKX (Faema) à 0.07
3. Charly Grosskost (Fra/Bic) 0.17
Jan Janssen (P-B/Bic) 0.17
1re étape (b) > 29 juin
Woluwe-St-Pierre (clm équipe)
Classement de l’étape (15,6 km)
1. Faema en 1:37.45
2. Bic à 0.46
3. Salvarani 0.48
4. Mann-Grundig 1.35
5. Peugeot-BP-Michelin 2.10
Les temps réels ne sont pas pris en compte au classement général mais les coureurs des trois premières équipes obtiennent respectivement 20 10 et 5 secondes de bonifications. Parmi eux, Eddy Merckx empoche 20 secondes, pour 5 à Rudi Altig.
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 3:31.16
2. Rudi Altig (All/Salvarani) à 0.08
3. Jan Janssen (P-B/Bic) 0.20
Charly Grosskost (Fra/Bic) 0.20
2e étape > 30 juin
Woluwe-St-Pierre – Maastricht (P-B)
Classement de l’étape (181.5 km)
1. JULIEN STEVENS (Faema) en 4:35.42
2. WILLY IN’T VEN (Mann)
3. Derek Harrison (G-B/Frimatic) à 0.01
4. Franco Balmamion (Ita/Salvarini) 0.02
5. Michaël Wright (G-B) 0.14
15. EDDY MERCKX (Bel) 0.16
Classement général
1. JULIEN STEVENS (Faema) 8:07.02
2. EDDY MERCKX (Faema) à 0.12
3. Rudi Altig (All/Salvarani) 0.20
3e étape > 1er juillet
Maastricht (P-B) – Charleville-Mézières
Classement de l’étape (213,5 km)
1. ERIC LEMAN (Flandria) en 5:56.15
2. Marino Basso (Ita/Molteni)
3. Michele Dancelli (Ita/Molteni)
4. Dino Zandegu (Ita/Salvarini)
5. PIETER NASSEN (Flandria)
15. EDDY MERCKX (Faema)
Classement général
1. JULIEN STEVENS (Faema) 14:03.17
2. EDDY MERCKX (Faema) à 0.12
3. Rudi Altig (All/Salvarani) 0.20
4e étape > 2 juillet
Charleville-Mézières – Nancy
Classement de l’étape (214 km)
1. RIK VAN LOOY (Willem II) en 5:18.02
2. JULIEN STEVENS (Faema) à 0.42
3. Dino Zandegu (Ita/Salvarini) 0.44
4. FRANS MINTJENS (Faema)
5. Désiré Letort (Fra/Peugeot)
39. EDDY MERCKX (Faema) 1.57
Classement général
1. JULIEN STEVENS (Faema) 19:21.51
2. Désiré Letort (Fra/Peugeot) à 1.28
3. EDDY MERCKX (Faema) 1.37
5e étape > 3 juillet
Nancy – Mulhouse
Classement de l’étape193,5 km
1. Joaq. Agostinho (Por/Frimatic) en 5:03.33
2. Rudi Altig (All/Salvarani) à 0.18
3. ROGER DE VLAEMINCK (Flandria)
4. EDDY MERCKX (Faema)
5. Rinus Wagtmans (P-B/Willem II)
Classement général
1. Désiré Letort (Fra/Peugeot) 24 : 27.10
2. EDDY MERCKX (Faema) à 0.09
3. Rudi Altig (All/Salvarani) 0.17
6e étape > 4 juillet
Mulhouse – Ballon d’Alsace
Classement de l’étape (133,5 km)
1. EDDY MERCKX (Faema) en 3:37.25
2. Joaquim Galera (Esp/Fagor) à 0.55
3. Rudi Altig (All/Salvarani) 1.55
4. ROGER DE VLAEMINCK (Flandria) 4.16
5. WILFRIED DAVID (Flandria) 4.21
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 28 : 04.44
2. Rudi Altig (All/Salvarani) à 2.03
3. Jan Janssen (P-B/Bic) 4.41
7e étape > 5 juillet
Belfort – Divonne-les-Bains
Classement de l’étape (241 km)
1. Mariano Diaz (Esp/Fagor) en 6:13.07
2. José-Antonio Momene (Esp/Fagor) à 1.53
3. Rinus Wagtmans (P-B/Willem II) 1.56
4. José-M. Lopez Rodriguez (Esp/Fagor) 2.07
5. Michele Dancelli (Ita/Molteni)
28. EDDY MERCKX (Faema)
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 34 : 19.58
2. Rudi Altig (All/Salvarani) à 2.03
3. Jan Janssen (P-B) 4.41
8e étape (a) > 6 juillet
Divonne-les-Bains (clm)
Classement de l’étape (8,8 km)
1. EDDY MERCKX (Faema) en 10.38.63
2. Rudi Altig (All/Salvarani) à 0.02
3. Charly Grosskost (Fra/Bic) 0.10
4. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) 0.15
5. Raymond Poulidor (Fra/Mercier) 0.16
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 34 : 30.36
2. Rudi Altig (All/Salvarani) à 2.05
3. Jan Janssen (P-B/Bic) 5.01
8e étape (b) > 6 juillet
Divonne-les-Bains – Thonon-les-Bains
Classement de l’étape (136.5 km)
1. Michele Dancelli (Ita/Molteni) 3:30.46
2. Andres Gandarias (Esp/Kas) à 0.04
3. Rinus Wagtmans (P-B/Willem II) 1.27
4. Marino Basso (Ita/Molteni) 1.56
5. ROGER DE VLAEMINCK (Flandria)
10. EDDY MERCKX (Faema)
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 38 : 03.18
2. Rudi Altig (All/Salvarani) à 2.05
3. Jan Janssen (P-B/Bic) 5.01
9e étape > 7 juillet
Thonon-les-Bains – Chamonix
Classement de l’étape (111 km)
1. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) en 2:48.23
2. EDDY MERCKX (Faema)
3. LUCIEN VAN IMPE (Sonolor) à 1.33
4. Andres Gandarias (Esp/Kas)
5. Raymond Poulidor (Fra/Mercier)
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 40 : 51.41
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 5.21
3. Raymond Poulidor (Fra/Mercier) 6.45
10e étape > 8 juillet
Chamonix – Briançon
Classement de l’étape (220.5 km)
1. HERMAN V. SPRINGEL (Mann) en 6:41.43
2. EDDY MERCKX (Faema) à 2.01
3. Rinus Wagtmans (P-B/Willem II)
4. Felice Gimondi (Ita/Salvarani)
5. Roger Pingeon (Fra/Peugeot)
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 47 : 35.25
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 5.21
3. Raymond Poulidor (Fra/Mercier) 6.49
11e étape > 9 juillet
Briançon – Digne-les-Bains
Classement de l’étape (198 km)
1. EDDY MERCKX (Faema) en 5:58.55
2. Felice Gimondi (Ita/Salvarani)
3. Gabriel Mascaro (Esp/Kas) à 0.22
4. Roger Pingeon (Fra/Peugeot)
5. Luis-Pedro Santamarina (Esp/Fagor) 0.23
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 53 : 34.20
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 5.43
3. Felice Gimondi (Ita/Salvarani) 7.29
12e étape > 10 juillet
Digne-les-Bains – Aubagne
Classement de l’étape (161,5 km)
1. Felice Gimondi (Ita/Salvarani) en 4:23.15
2. Andres Gandarias (Esp/Kas)
3. EDDY MERCKX (Faema)
4. VICTOR VAN SCHIL (Faema)
5. Stéph. Abrahamian (Fra/Sonolor) à 1.23
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 57 : 57.30
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 7.11
3. Felice Gimondi (Ita/Salvarani) 7.14
13e étape > 11 juillet
Aubagne – La Grande Motte
Classement de l’étape (195,5 km)
1. GUIDO REYBROUCK (Faema) en 5:48.54
2. Jan Janssen (P-B/Bic)
3. ERIC LEMAN (Flandria)
4. Harm Ottenbros (P-B/Willem II)
5. Michele Dancelli (Ita)
10. EDDY MERCKX (Faema)
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 63 : 51.04
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 7.11
3. Felice Gimondi (Ita/Salvarani) 7.14
14e étape > 12 juillet
La Grande Motte – Revel
Classement de l’étape (234,5 km)
1. Joaqim Agostinho (Por/Frimatic) 6:59.53
2. Eddy Beugels (P-B/Mercier) à 1.18
3. WILFRIED DAVID (Flandria)
4. ERIC LEMAN (Flandria) 2.14
5. Dino Zandegu (Ita/Salvarani)
31. EDDY MERCKX (Faema)
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 70 : 53.11
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 7.11
3. Felice Gimondi (Ita/Salvarani) 7.14
15e étape > 13 juillet
Revel (clm)
Classement de l’étape (18,5 km)
1. EDDY MERCKX (Faema) en 24.08.7
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 0.52
3. Raymond Poulidor (Fra/Mercier) 0.55
4. Rudi Altig (All/Salvarani) 0.59
5. Rinus Wagtmans (P-B/Willem II) 1.03
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 71 : 17.19
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 8.03
3. Felice Gimondi (Ita/Salvarani) 8.47
16e étape > 14 juillet
Castelnaudary – Luchon
Classement de l’étape (199 km)
1. Raymond Delisle (Fra/Peugeot) 6:13.21
2. Jan Janssen (P-B/Bic) à 0.23
3. Wladimiro Panizza (Ita/Salvarani) 0.24
4. EDDY MERCKX (Faema) 2.45
5. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) 3.03
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 77 : 33.25
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 8.21
3. Felice Gimondi (Ita/Salvarani) 9.29
17e étape > 15 juillet
Luchon – Mourenx
Classement de l’étape (214,5 km)
1. EDDY MERCKX (Faema) en 7:04.28
2. Michele Dancelli (Ita/Molteni) à 7.56
3. MARTIN VANDENBOSSCHE (Faema) 7.57
4. André Bayssière (Fra/Peugeot)
5. Roger Pingeon (Fra/Peugeot)
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 84:37.53
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 16.18
3. Raymond Poulidor (Fra/Mercier) 20.43
18e étape > 16 juillet
Mourenx – Bordeaux
Classement de l’étape (192,5 km)
1. Barry Hoban (G-B/Mercier) en 5:44.43
2. Harm Ottenbros (P-B/Willem II)
3. Pietro Guerra (Ita/Salvarani)
4. Roland Berland (Fra/Bic)
5. Francis Rigon (Fra/Frimatic)
56. EDDY MERCKX (Faema) à 0.52
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 90:23.28
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 16.18
3. Raymond Poulidor (Fra/Mercier) 20.43
19e étape > 17 juillet
Bordeaux – Brive-la-Gaillarde
Classement de l’étape (192,5 km)
1. Barry Hoban (G-B/Mercier) en 5:30.57
2. Evert Dolman (P-B/Willem II)
3. Pietro Guerra (Ita/Salvarani)
4. JOSEPH SPRUYT (Faema)
5. Eddy Schutz (Lux/Molteni)
34. EDDY MERCKX (Faema) à 1.29
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 95 : 55.54
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 16.18
3. Raymond Poulidor (Fra/Mercier) 20.43
20e étape > 18 juillet
Brive-la-Gaillarde – Puy de Dôme
Classement de l’étape (198 km)
1. Pierre Matignon (Fra/Frimatic) en 6:49.54
2. EDDY MERCKX (Faema) à 1.25
3. Paul Gutty (Fra/Frimatic) 1.30
4. MARTIN VANDENBOSSCHE (Faema) 1.47
5. Roger Pingeon (Fra/Peugeot)
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 102:47.13
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 16.40
3. Raymond Poulidor (Fra/Mercier) 21.20
21e étape > 19 juillet
Clermont-Ferrand – Montargis
Classement de l’étape (329,5 km)
1. HERMAN VAN SPRINGEL (Mann) en 9:37.47
2. Harm Ottenbros (P-B/Willem II)
3. Giacinto Santambrogio (Ita/Molteni)
4. Lucien Aimar (Fra/Bic)
5. Giancarlo Ferretti (Ita/Salvarani)
62. EDDY MERCKX (Faema) à 1.38
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 112:24.22
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 16.40
3. Raymond Poulidor (Fra/Mercier) 21.20
22e étape (a) > 20 juillet
Montargis – Créteil
Classement de l’étape (111,5 km)
1. JOSEPH SPRUYT (Faema) en 2:56.18
2. GEORGES VANDENBERGHE (Faema) à 0.08
3. Gerben Karstens (P-B/Peugeot)
4. Evert Dolman (P-B/Willem II)
5. Wilfried Peffgen (All/Salvarani)
54. EDDY MERCKX (Faema) 5.27
Classement général
1. EDDY MERCKX (Faema) 115:28.23
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 16.40
3. Raymond Poulidor (Fra/Mercier) 21.20
22e étape (b) > 20 juillet
Créteil – Paris (clm)
Classement de l’étape (36,8 km)
1. EDDY MERCKX (Faema) en 47.38.4
2. Raymond Poulidor (Fra/Mercier) à 0.53
3. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) 1.14
4. Rinus Wagtmans (P-B/Willem II) 1.28
5. Felice Gimondi (Ita/Salvarani) 2.53
CLASSEMENT GÉNÉRAL FINAL
1. EDDY MERCKX (Faema) 116:16.02
(35,444 km/h)
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) à 17.54
3. Raymond Poulidor (Fra/Mercier) 22.13
4. Felice Gimondi (Ita) 29.24
5. Andres Gandarias (Esp) 33.04
6. Rinus Wagtmans (P-B) 33.57
7. Pierfranco Vianelli (Ita) 42.40
8. Joaquim Agostinho (Por) 51.24
9. Désiré Letort (Fra) 51.41
10. Jan Janssen (P-B) 52.56
Les autres Belges…
12. Lucien Van Impe (Sonolor) 56.17
18. Herman Van Springel (Mann) 1:10.11
23. Martin Vandenbossche (Faema) 1:22.08
27. Wilfried David (Flandria) 1:36.31
28. Joseph Spruyt (Faema) 1:42.08
29. Victor Van Schil (Faema) 1:49.08
40. Edward Janssens (Mercier) 2:15.49
44. Roger Swerts (Faema) 2:26.19
56. Georges Vandenberghe (Faema) 2:44.17
57. Ferdinand Bracke (Peugeot) 2:45.28
60. Jaak De Boever (Flandria) 2:47.11
64. Juul Van der Flaas (Willem II) 2:51.44
72. Julien Stevens (Faema) 2:59.38
74. Michel Coulon (Flandria) 3:06.01
75. Paul In’t Ven (Mann) 3:06.02
76. Frans Mintjens (Faema) 3:07.06
77. Guido Reybrouck (Faema) 3:08.00
79. Eric Leman (Flandria) 3:12.13
82. Marc De Block (Flandria) 3:21.15
84. Roger Cooreman (Mann) 3:34.37
86 classés sur 130 partants
CLASSEMENT PAR POINTS
1. EDDY MERCKX (Faema) 244 pts
2. Jan Janssen (P-B/Bic) 149 pts
3. Rinus Wagtmans (P-B/Willem II) 136 pts
CLASSEMENT DE LA MONTAGNE
1. EDDY MERCKX (Faema) 155 pts
2. Roger Pingeon (Fra/Peugeot) 94 pts
3. Joaquim Galera (Esp/Fagor) 80 pts
COMBINÉ
EDDY MERCKX (Faema)
MEILLEURE ÉQUIPE
Faema





