Footgate

Le jour où le visage du foot belge a basculé

Mogi Bayat

Introduction


“Si on ne peut plus tricher avec ses amis, ce n’est plus la peine de jouer aux cartes”. Les mots ont été écrits par Marcel Pagnol mais pourraient parfaitement s’appliquer au petit monde fermé du football belge. Douze ans après l’affaire Zheyun Ye, notre pays a une nouvelle fois été confronté à la dure réalité du ballon rond, où les petits arrangements entre amis et les magouilles s’organisent parfois sans aucun scrupule.

C’était le 10 octobre 2018 et depuis cette date, plus rien n’est vraiment comment avant. Le Footgate a volé le peu d’insouciance qu’il restait aux fans de foot. Une affaire complexe, aux multiples ramifications. Avec une première enquête qui comprend deux volets, et une deuxième dont on sait encore peu de choses. 

Plusieurs agents de joueurs sont en première ligne. Mogi Bayat, un homme qu’on ne présente plus. Le “Monsieur transferts” en Belgique, par qui tout transite, et qui aurait manipulé plusieurs transferts pour maximiser ses commissions à l’insu des joueurs et des clubs concernés. Mais aussi un certain Dejan Veljkovic, un agent serbe relativement méconnu et soupçonné d’avoir imaginé des constructions pour s’octroyer des commissions cachées, ainsi que des primes occultes, sur plusieurs transferts. 

Et c’est justement en fouinant dans les affaires de Veljkovic que l’enquête a pris une tournure inattendue. Les enquêteurs ont ainsi découvert qu’il avait le bras bien plus long qu’ils ne l’imaginaient lorsqu’il a tout tenté pour permettre au FC Malines de se sauver, en s’arrangeant avec des dirigeants de clubs ou en se rapprochant de deux arbitres. La raison est simple: le Serbe possédait plusieurs joueurs de l’équipe dans son portefeuille et avait réussi, au fil des années, à devenir un personnage très important dans la vie du Malinwa. Deux matches ont particulièrement attiré l’oeil des enquêteurs: Antwerp - Eupen et Malines - Waasland-Beveren, sur lesquels pèsent de lourds soupçons de falsification.

La justice ne s’est pas encore prononcée sur ces faits. Mais elle a déjà sorti de son chapeau une nouvelle affaire. Une deuxième enquête, indépendante, qui s’intéresse aux transferts d’Aleksandar Mitrovic et Youri Tielemans lorsqu’ils ont quitté Anderlecht. Deux autres figures de notre football ont été citées: Herman Van Holsbeeck (ex-directeur général des Mauves, qui a été inculpé de corruption, blanchiment d'argent et faux) et Christophe Henrotay (agent de joueurs réputé, qui devra attendre son extradition pour savoir s’il est inculpé). 

Partie 1

L'affaire Mogi

Chapitre 1 : Arnaud


Lasne, mercredi 10 octobre 2018, 6h. Une équipe cagoulée et lourdement armée de la brigade spéciale s’apprête à pénétrer dans une des immenses demeures qui garnissent cette commune huppée du Brabant wallon. Le propriétaire des lieux n’est pas n’importe qui. Un certain Arnaud Bayat, dit « Mogi », agent le plus influent de Belgique. Et personnage central d’une affaire qui va secouer le football belge.

Perquisitionner une telle maison, composée de plus de 50 pièces, constitue un sacré défi pour les enquêteurs, qui doivent préparer un plan minutieux. Il se murmure que Bayat dispose d’une « safe room », une pièce secrète où il aurait le loisir de se réfugier et donc de faire disparaître des documents sensibles. Il faut donc faire vite, pour qu’il n’ait pas le temps de réagir. Tant pis si cela nécessite d’y aller en force, quitte à pointer une arme sur Nathalie, son épouse, devant ses propres enfants… "C’est comme si on était là face à un dossier de terrorisme", s’indignait alors Me Jean-Philippe Mayence, avocat de Bayat, dans La DH.

L’assaut donné, Bayat est interpellé à 6h02. La perquisition peut commencer. Les agents ne repartent pas bredouille : 130 boîtes de montres de luxe, 7500 euros en cash, des piles de documents. Il faudra toute une matinée pour mettre la main sur ce pactole. 

En vérité, c’est un gigantesque coup de pied dans la fourmilière qui a été donné par les enquêteurs ce matin-là. Quarante-quatre perquisitions sont menées à travers tout le pays, et même à l’étranger. Aucun niveau du monde footballistique n’y échappe. Des clubs (Anderlecht, Standard, Bruges, Genk, Gand, Courtrai, Lokeren, …) reçoivent la visite de policiers, des (ex-)dirigeants (Dirk Huyck, Johan Timmermans, Olivier Somers, Thierry Steenmans…), des agents (Dejan Veljkovic, Karim Mejjati, Thomas Troch, …), un entraîneur (Ivan Leko), un joueur (Olivier Myny) et même des arbitres (Bart Vertenten et Sébastien Delferière) et trois journalistes font partie des personnes interrogées.

Chapitre 2 : Le collectionneur


Personnage clivant par excellence, Mogi Bayat est un homme admiré ou détesté. Sa reconversion en tant qu’agent de joueurs, après avoir officié comme manager général du Sporting Charleroi, est une incontestable réussite. En ayant toujours un coup d’avance sur les autres, il a très vite su se rendre indispensable dans le paysage footballistique belge. Un joueur à recruter? Un autre dont vous voulez vous débarrasser? Un contrat à renégocier? Il suffit de demander à Mogi, à qui on a collé l’étiquette d’homme capable de rendre possible les deals impossibles. 

L’agent a ses entrées partout, ou presque: à Anderlecht, Gand, Charleroi, Courtrai… Il s’affiche sur toutes les photos de ses transferts et devance même certains clubs en annonçant en primeur la signature d’un de ses poulains dans son nouveau club. Du jamais vu… Ceux qui le côtoient sont unanimes: personne n’est meilleur que lui en Belgique. Même ceux qui ne sont pas fans du personnage finissent par se rendre à l’évidence: mieux vaut l’avoir avec que contre soi.

Voilà pour le côté pile. Côté face, Bayat est un homme à la réputation sulfureuse, dont l'ascension fulgurante lui a valu beaucoup de jalousies dans le milieu. D’autant qu’il n’est pas du genre modeste et qu’il manie parfois l’art de la provocation. Des agents voient aussi leurs joueurs leur tourner le dos pour aller toquer à la porte de Mogi afin de faciliter leur transfert. D’autres sont obligés de passer par lui pour faire rentrer un joueur de leur écurie dans un club. Le Franco-Iranien a réussi à créer tout un système dans lequel il s’est rendu indispensable. Forcément, ça en agace plus d’un. 

A Anderlecht, on dit qu’il possède même son propre bureau au centre d’entraînement de Neerpede, alors qu’il n’occupe officiellement aucun poste au sein du club bruxellois. 

Après son arrestation, il ne suffira que de quelques heures pour qu'il fasse la Une de tous les journaux. Bayat est rapidement inculpé pour blanchiment et organisation criminelle. Il est soupçonné par le parquet fédéral d’avoir manipulé le transfert de plusieurs joueurs, dans le but de maximiser ses profits, au détriment de l’intérêt des clubs et des joueurs. Avec l’aide de son avocat Laurent Denis - lui aussi inculpé avec les mêmes chefs et, au passage, déjà impliqué dans l’affaire Zheyun Ye -, il aurait en fait réussi à mettre en place un système permettant de cacher ces pratiques aux clubs et aux joueurs avec qui il travaillait. 

Interrogé, il nie. Tout. Sauf peut-être quelques irrégularités sur la TVA. “Mon client est collectionneur de boîtes de montres de luxe depuis toujours. C’est son droit”, répondra à ce sujet Me Jean-Philippe Mayence, son avocat. Selon ce dernier, toutes les factures de sa comptabilité prouvent qu’il n’a grugé personne. Ce sera à la justice de se prononcer sur ces faits. 

Mogi Bayat passera au total 47 jours derrière les barreaux avant d’être libéré sous conditions, après avoir payé une caution de 150.000 euros. Meurtri par ces longues journées passées en cellule, l’agent est déterminé à l’idée de revenir plus fort, comme l’assurait son frère Mehdi à sa sortie. “Mogi veut rétablir son honneur le plus vite possible”. 

En toute discrétion, il reprendra même ses affaires dès le mercato de janvier, en bouclant plusieurs transferts, comme le retour de Kara à Anderlecht. Comme si de rien n’était. Après tout, pourquoi l’empêcher de faire son métier ?

Partie 2

L'affaire des matches truqués

Chapitre 3 : Le docteur


“Tout est en ordre, la cuisine est commandée”, lance Dejan Veljkovic au bout du fil. Nous sommes à cinq jours du dernier match de la saison qui doit opposer Malines à Waasland-Beveren. L’agent serbe est au téléphone avec Thierry Steenmans, directeur financier du club malinois. Un appel étrange, d’autant qu’il sort d’une visite auprès de l’entreprise de cuisine tenue par la femme de Dirk Huyck, le président beverenois. Veljkovic ne le sait pas, mais voilà plusieurs mois qu’il a été placé sur écoute. Malgré ses précautions, les enquêteurs ne sont pas dupes et comprennent qu’il a ficelé un arrangement pour faire gagner Malines, obligé de l’emporter pour se maintenir en Division 1A. Tarif de la magouille: 200.000 euros, comme Huyck le révélera aux enquêteurs. 

De leur côté, les agents Walter Mortelmans et Thomas Troch sondent leur client Olivier Myny, qui joue à Waasland-Beveren. Ce dernier sous-entend qu’en cas de “bonne” prestation, un contrat attendrait Myny la saison suivante à Malines. “Tu veux que je frappe au-dessus du ballon?”, demande l’attaquant, sous forme de boutade. “Peut-être que tu ne devrais pas fêter ça devant eux pendant le match si tu marques. Et ne te laisse pas tomber dans les dernières minutes”, lui rétorque Troch.

Les enquêteurs n’ont pas dû attendre ces révélations pour avoir de sérieux doutes sur Veljkovic, qu’ils suivent à la loupe depuis des mois. Au fil des années, le Serbe est devenu tout-puissant à Malines, bien qu’il n’y occupe aucune fonction officielle. Cela remonte à l’époque de l’arrivée d’Aleksandar Jankovic comme coach, en 2014. Son influence et son crédit n’ont ensuite cessé de grandir Derrière Les Casernes, encore plus depuis qu’il a fait gagner des millions au club après les ventes d’Ivan Obradovic à Anderlecht (2015) et de Milos Kosanovic au Standard (2016). A Malines, on préfère du coup fermer les yeux sur les pratiques parfois limites de l’agent. Ses relations douteuses avec la direction et ses passe-droits vont néanmoins, lentement mais sûrement, faire couler le club.

Et il n’y a pas qu’avec les Sang et Or qu’il entretient des relations ambiguës. L'enquête montre que Veljkovic s’est ainsi dangereusement rapproché de Sébastien Delferière et Bart Vertenten, deux des arbitres les plus respectés du championnat belge. 

A Delferière, avec qui il entre en contact “des centaines de fois” selon les relevés téléphoniques, il parvient à obtenir une belle réduction sur sa future voiture, grâce à ses bons contacts avec un garagiste alostois. Il lui “offre” aussi 10.000 euros en cash pour sponsoriser son école de football et ouvre un compte pour la naissance de son fils avec une provision de 500 euros. Les écoutes montrent que les deux hommes affichent une proximité étonnante, évoquant des sujets de la vie de tous les jours. Mais Veljkovic n’oublie pas de demander à son ami quels sont les matches qu’il doit arbitrer prochainement. On ne sait jamais, ça peut toujours servir… Les contacts seront subitement moins fréquents à partir du mois de février, quand l’arbitre voit sa saison se terminer à cause d’une blessure au ménisque.

Avec Vertenten, Veljkovic se montre aussi particulièrement chaleureux. Il invite celui qu’il surnomme “le docteur” - en référence à sa profession de radiologue dans un hôpital bruxellois - autour d’une bonne table avec leur épouse respective. L’enquête montre qu’ils sont en contact avant un Malines - Charleroi durant lequel un penalty très litigieux sera sifflé contre les Carolos. “Si on se croise après le match, il vaut mieux faire comme si nous ne nous connaissions pas”, lui conseille l’agent. “Parfait”, répond l’arbitre.

Mais c’est un tumultueux Antwerp - Eupen, arbitré par Bart Vertenten, qui va mettre le feu aux poudres. 

Dejan Veljkovic.

Dejan Veljkovic.

Bart Vertenten

Bart Vertenten

Sébastien Delferière.

Sébastien Delferière.

Chapitre 4 : La remontada


Le Bosuil est un stade particulier. Quiconque y a déjà mis les pieds peut en témoigner. Il y règne une ambiance “british” unique en Belgique, avec des supporters parmi les plus passionnés du pays. Même si elle a été modernisée, l’enceinte conserve les traces de sa riche histoire. 

Lorsque l’équipe d’Eupen s’y rend lors de l’avant-dernière journée du championnat 2017-2018, elle sait qu’elle n’a pas vraiment le droit à l’erreur. Elle livre un duel à distance avec Malines et Mouscron pour assurer sa survie parmi l’élite. En face, le matricule 1 est toujours en course pour accrocher les playoffs 1. Les Anversois sont plus forts sur papier et doivent donc logiquement l’emporter. Ils vont rapidement ouvrir le score grâce à un tir croisé imparable de Faris Haroun. La partie bascule définitivement peu avant la demi-heure de jeu lorsque Valiente accroche Bula. Faute indiscutable. Sans hésiter, Bart Vertenten indique le point de penalty. La protestation des joueurs germanophones ne pèse pas bien lourd face aux rires moqueurs qui s’échappent des tribunes. Et pour cause: tout le stade a bien vu que la faute avait été commise deux mètres en dehors du rectangle. Mais l’arbitre, appuyé par son assistant qui ne le corrigera pas, semble soudainement frappé par de graves problèmes de vue. C’est 2-0 pour l’Antwerp et Eupen ne reviendra plus. 

Une semaine plus tard vient ce fameux match entre Malines et Waasland-Beveren. Il faut sortir sa calculette pour savoir qui de Malines ou d’Eupen - qui reçoit Mouscron, entre-temps sauvé - se sauvera, en fonction de leur résultat. Au coup d’envoi, la différence de buts plaide en faveur du KaVé (-20 contre -21).  

A 2-0 pour Malines en deuxième mi-temps, le plan se passe comme prévu par Veljkovic et certains dirigeants. D’autant que les Pandas sont incapables de bousculer Mouscron au Kehrweg, où le marquoir affiche toujours 0-0 à vingt minutes du terme. Eupen doit inscrire trois buts pour se sauver. Impensable. Même face à une équipe mouscronnoise démobilisée qui n’a plus rien à espérer.

Et puis vint l’improbable… 70e minute: Yuta Toyokawa ouvre la marque. 73e minute: une frappe de Luis Garcia trompe Werner. L'histoire est en train de basculer. L'équipe de Claude Makelele n’a désormais besoin que d’un seul petit but, à condition que Malines ne marque plus. Complètement esseulé sur corner, Toyokawa plante alors sept minutes plus tard son deuxième but du jour pour faire 3-0, suivi d’un troisième après une erreur monumentale de la défense de Mouscron. Un triplé pour un parfait inconnu qui offre le maintien à Eupen. Malines, qui suit la rencontre à distance, n’a que ses yeux pour pleurer. Et ne tarde pas à s’en prendre à Mouscron après cette “remontada” improbable.

“Même si nous l’avions emporté 4-0, Eupen aurait gagné 6-0”, fustige Johan Timmermans, le président malinois. “Toute la Belgique est dégoûtée”, ajoute Dennis Van Wijk, le coach. “Mouscron n’a pas respecté la Pro League”, estime quant à lui l’attaquant Nicolas Verdier. 

Hendrick Van Crombrugge, alors à Eupen, répond aux Malinois le lendemain dans une interview choc à Sporza. "Il y a des choses qui se sont passées cette semaine autour du club, c'est surréaliste. Je ne vais pas rentrer dans les détails mais ce sont des choses qui n'ont pas leur place dans le football. (...) Ceux qui ont voulu nous faire du mal doivent aujourd'hui baisser les yeux." On ne le sait pas encore, mais le Diable Rouge sera le premier à ouvertement parler du Footgate.

Chapitre 5 : Le repenti


Quand il est interrogé par les enquêteurs, Dejan Veljkovic, inculpé de participation à une organisation criminelle, blanchiment et corruption privée, est aux abois. S’il nie dans un premier temps tout ce dont on le soupçonne, même s’il reconnaît des problèmes de comptabilité, l’agent se rend vite compte qu'ils ont “des biscuits”. Il sait que le piège est en train de se refermer sur lui.

On lui propose un deal. Il balance tout en échange du statut de repenti, en vigueur depuis le mois de septembre et qui n’a encore jamais été accordé dans notre pays. Un statut qui lui assure une peine moins sévère - il évitera la prison, disons-le clairement - et qui lui permet d’être libéré sous conditions. Or, quand on vient de passer 41 jours derrière les barreaux, il y a de quoi réfléchir.

Il lui faudra 96 heures d’audition pour raconter tout ce qu’il sait. Le contenu de ces révélations est encore aujourd'hui méconnu. On sait toutefois qu'il expliquera que l’ancien entraîneur de Bruges, Ivan Leko, dont il gère les intérêts, avait perçu de l’argent sur les transferts de Tomecak, Rits ou Letica, ainsi que pour aligner certains joueurs. Le coach est d’ailleurs inculpé pour blanchiment pour ces faits. 

Le comble, c'est que toutes les manoeuvres de Dejan Veljkovic avec les dirigeants malinois et beverenois n’auront finalement servi à rien. Malines a bien chuté en Division 1B. La fameuse victoire d’Eupen, aussi improbable soit-elle, n’éveillera jamais les suspicions du parquet fédéral. L’Union Belge ouvrira bien une enquête de son côté, mais le dossier sera classé sans suite. 

Les carrières de Bart Vertenten et Sébastien Delferrière sont, elles, terminées. Dans la foulée des révélations, les deux arbitres ont été immédiatement suspendus et ne siffleront plus jamais le moindre match professionnel. 

Pour Malines et Waasland-Beveren, les sanctions sportives ne tomberont… jamais. Ou quasiment. D’abord condamné par le chambre d’appel de la commission des litiges de la fédération à évoluer en D1B, avec douze points de pénalité malgré son titre acquis, Malines obtiendra gain de cause devant la CBAS. Le club pourra bien évoluer parmi l’élite, mais sera privé de Coupe de Belgique - dont il était le tenant du titre - et d’Europa League. Waasland-Beveren sera blanchi, même si Olivier Swolfs (directeur financier) et Dirk Huyck (président) ont été suspendus pour un an pour toutes activités liées au football, de manière effective pour le premier, avec sursis pour le second. 

Dans sa justification, la CBAS a tout de même reconnu que Malines avait bien falsifié la compétition. Mais elle estimait qu’il n’était pas possible de sanctionner le club alors que la saison où les faits avaient été commis était terminée depuis plus d’un an. Par contre, Johan Timmermans, président et membre du conseil d’administration, et Thierry Steenmans, directeur financier, ont été suspendus dix ans pour toutes activités liées au football. Stefaan Vanroy, le directeur sportif, écopera lui de sept ans.

Placé sous surveillance policière, Veljkovic vit aujourd’hui reclu dans une villa, dans un lieu tenu secret. Il est aujourd’hui suspendu pendant dix ans de toutes activités liées au football, en attendant une sanction pénale. Où, grâce à son statut de repenti, il ne risque désormais plus grand chose...

Partie 3

L'affaire Henrotay-Van Holsbeeck

Chapitre 6 : Monaco


Six mois plus tard, il règne une drôle d’atmosphère après les premières révélations sur le Footgate. La tempête médiatique est passée. Mogi Bayat s’affiche parfois tout sourire dans certaines tribunes de Pro League, tandis que la présence de Dejan Veljkovic à un Anderlecht-Bruges fait couler beaucoup d’encre, même si le Serbe essaie de se fondre dans la masse. 

Au fond, on le sent: il va encore se passer quelque chose. Quoi ? Quand ? Comment ? Et surtout, qui ? Les premières réponses à ces questions tombent le 24 avril 2019, quand des perquisitions sont menées au siège de l’Union belge, ainsi qu’à Neerpede, au centre d’entraînement d’Anderlecht. 

Juridiquement parlant, c’est un dossier indépendant du premier, mené par un autre juge d’instruction. Il concerne des transactions louches sur deux transferts réalisés par Anderlecht, qui avait envoyé Aleksandar Mitrovic à Newcastle en 2015 (contre 18,5 millions) et Youri Tielemans à Monaco en 2016 (contre 25 millions). Là aussi, des rétrocommissions seraient jugées suspectes. 

Or, derrière ces deux transferts se cachent deux gros poissons. D’un côté, l’agent Christophe Henrotay, qui sera arrêté le 11 septembre 2019 à Monaco. De l’autre, Herman Van Holsbeeck, à l’époque manager général d’Anderlecht, arrêté le lendemain.

Van Holsbeeck n’est pas n’importe qui. En tant que dirigeant du plus grand club de Belgique, il fut l’un des hommes les plus puissants du football belge pendant 15 ans, entre 2003 et 2018. Au fil des années, il est aussi devenu de plus en plus proche de Mogi Bayat, une amitié qu'il a toujours assumée. A la fin de son règne, la plupart des transferts d’Anderlecht étaient d’ailleurs à mettre au crédit de Mogi Bayat. Quand Marc Coucke a racheté le club bruxellois, il n’a jamais caché qu’il avait découvert “des cadavres dans les placards”, pour reprendre ses mots. Il ne lui a fallu que quelques semaines pour virer Van Holsbeeck pour faute grave, ce que ce dernier conteste devant les tribunaux. 

Inculpé des chefs de corruption privée, blanchiment, faux et usage de faux et association de malfaiteurs, l’ex-manager général des Mauves a été libéré sous conditions après une nuit passée en cellule. On dit qu’il aurait ainsi fait des aveux partiels et qu’il aurait balancé “du lourd”. Quoi? On finira par le savoir...