Sur la route des Jeux de Tokyo

Immersion au coeur du Team Belgium à Belek

À moins de 250 jours du début des Jeux olympiques de Tokyo, le COIB a organisé en Turquie son stage multidisciplinaire d’automne en présence de 63 sportifs de haut niveau.

La DH Les Sports + était présente au coeur de ce rassemblement marquant le coup d’envoi de la préparation finale pour les JO. Nous vous proposons de plonger dans les coulisses de cette importante étape de la préparation des JO, à travers notre récit, nos photos et vidéos.

"Je crois bien qu’on a trouvé notre point de chute idéal pour les années à venir"

Après deux semaines d’un rassemblement sans fausse note, l’évidence, énoncée par un membre éminent du Comité olympique et interfédéral belge, saute aux yeux. Le Gloria Sports Arena de Belek, à 40 kilomètres de la ville côtière d’Antalya, détient tous les atouts pour retenir durablement le Team Belgium dans le sud de la Turquie.

Du 23 novembre au 8 décembre 2019, une soixante d’athlètes belges issus de neuf disciplines ont été réunis avec leurs entraîneurs pour un stage d’automne dans ce centre polyvalent dédié au sport de haut niveau qui s’est érigé en référence sur le continent européen. Pour la plupart de nos sportifs, il s’agissait de découvrir et de prendre ses marques dans ce grand complexe de 105 000 m² dominé par un hôtel bordant la très belle piste d’athlétisme. Sous la tribune latérale qui jouxte le Mondo, un long couloir indoor permet d’enregistrer des chronos tous les 10 mètres.

"Cela fait 100m de long, plus l’espace prévu pour la décélération. C’est l’idéal !" s’exclame François Gourmet, le coach des Belgian Tornados Julien Watrin et Robin Vanderbemden. Derrière la tribune, des escaliers sont investis par les sportifs afin d’y faire des bonds et d’y travailler l’explosivité. Une rampe inclinée semble, elle, être le lieu idéal pour faire des séances de survitesse. À quelques mètres de là, c’est un petit bassin d’eau froide pour favoriser la récupération qui attend les athlètes.

"Franchement, on aurait voulu imaginer les lieux nous-mêmes que l’on ne s’y serait pas pris autrement. Je pense qu’il y a ici tout ce dont un entraîneur et son athlète veulent disposer", explique Carole Bam, la coach de Cynthia Bolingo et des Belgian Cheetahs, qui avait découvert cet endroit deux ans plus tôt avec la ligue francophone d’athlétisme. "On trouve tout sur un petit périmètre. On n’a que quelques pas à faire pour passer de l’hôtel à la piste, les soins médicaux peuvent être prodigués à quelques mètres et la salle de musculation, immense et lumineuse, offre une vue imprenable sur la piste. C’est un vrai bonheur."

"Et en plus, on mange très bien !" ajoute la sprinteuse Camille Laus, capitaine des Cheetahs. "Le buffet au restaurant est très varié, il y en a pour tous les goûts. Une alimentation saine est une réelle préoccupation pour la plupart des sportifs, qui ont parfois des besoins très différents en la matière, et ici on a vraiment l’embarras du choix."

Si les athlètes constituaient le plus grand groupe au sein du Team Belgium présent à Belek, on a également noté cette année le retour des Red Lions lors de ce grand rassemblement national. Il faut dire qu’un terrain de hockey d’excellente qualité était à la disposition de notre équipe nationale, championne du monde et championne d’Europe, sur le site. "C’est agréable de pouvoir s’entraîner sous les soleil, surtout quand il fait aussi froid en Belgique", sourit Shane McLeod, le coach de nos hockeyeurs. "Plus sérieusement, ce séjour nous permet de nous plonger un peu dans l’ambiance olympique et dans un groupe plus large que le nôtre où il est agréable de faire de nouvelles rencontres, d’entamer des discussions avec des sportifs d’autres disciplines. Il y a toujours des choses à apprendre des autres."

"Les Red Lions eux-mêmes sont des personnalités très inspirantes", souligne Olav Spahl, le directeur du Haut Niveau au COIB. "Ce n’est pas pour rien qu’ils comptent de très nombreux supporters dans les autres sports. Je pense qu’ils apprécient de se connecter avec ces autres sportifs pendant quelques jours. C’est important pour tout le monde et leur présence à Belek constitue une vraie valeur ajoutée parce que les sports collectifs développent un état d’esprit positif dans un groupe."

Les vététistes Githa Michiels et Jens Schuermans ont trouvé un terrain de jeu idéal, en Turquie.

Les vététistes Githa Michiels et Jens Schuermans ont trouvé un terrain de jeu idéal, en Turquie.

L'athlète Hanne Maudens en pleine séance de tests physiques.

L'athlète Hanne Maudens en pleine séance de tests physiques.

Camille Laus en pleine partie de billard.

Camille Laus en pleine partie de billard.

Toma Nikiforov et Jonathan Sacoor en pleine séance de cryothérapie. Pas le même gabarit, mais le même objectif: une médaille à Tokyo.

Toma Nikiforov et Jonathan Sacoor en pleine séance de cryothérapie. Pas le même gabarit, mais le même objectif: une médaille à Tokyo.

Et si la médaille aux JO passait par... une course de caisses à savon ?

Et si la médaille aux JO passait par... une course de caisses à savon ?

Un team-building indispensable avant les Jeux

La force de ce rassemblement devenu annuel depuis 2016, à la demande unanime de tous les entraîneurs consultés, et auquel participent les sponsors et les partenaires institutionnels, tient précisément aux nombreux échanges auxquels se livrent tous les acteurs. Différents ateliers sont prévus sur la quinzaine, à l’attention des athlètes et des coaches, afin de les sensibiliser à tel ou tel aspect du sport de haut niveau. Et bien entendu, cette année, ce sont les Jeux olympiques de Tokyo et ses spécificités qui figuraient au coeur des discussions.

"Pour ma part, je connais très peu de monde dans les autres sports et c’est l’occasion de tisser certains liens, de voir comment les autres s’entraînent", glisse la jeune sprinteuse Lucie Ferauge, encore un peu intimidée. C’est pour des athlètes comme elle que le COIB a notamment créé un album Panini autour des participants au stage, ceux-ci devant ainsi se familiariser avec certains noms ou visages méconnus.

L'album Panini a eu son succès. Vincent Vanasch et Toma Nikiforov se sont bien trouvés au moment de faire des échanges...

L'album Panini a eu son succès. Vincent Vanasch et Toma Nikiforov se sont bien trouvés au moment de faire des échanges...

Au-delà des possibilités de divertissement (billard, kicker, etc.) permettant de crée du lien, plusieurs athlètes (Camille Laus, Hanne Claes, Claire Orcel, Philip Milanov) ont sauté sur l’occasion pour s’essayer à d’autres disciplines. Toma Nikiforov et son coach Damino Martinuzzi ont ainsi connu un beau succès sur le tatami pour des séances d’initiation au judo.

Quand l'athlète Philip Milanov défie Toma Nikiforov sur le tatami...

Quand l'athlète Philip Milanov défie Toma Nikiforov sur le tatami...

Hyperactif et hyper... compétitif, le Schaerbeekois ne s’est, quant à lui, pas fait prier pour participer, toujours avec la même envie, à un maximum d’activités et à découvrir notamment le taekwondo.

"Franchement, cet endroit est top !" lance Toma Nikiforov, dont la blessure à l’épaule ne sera bientôt plus qu’un mauvais souvenir. "On mange, on dort, on s’entraîne. Toutes les facilités sont proches les unes des autres. Le staff médical est super, j’ai un sauna, de la cryothérapie, c’est l’idéal pour moi !"

L’activité de team-building la plus appréciée fut, de loin, la construction, en petits groupes, de caisses à savon en bois, un atelier qui s’est achevé par un contre-la-montre par équipes très disputé dans les jardins du Gloria Sports Arena. Frissons et fous rires garantis !

Des experts omniprésents

Les athlètes présents au stage sont évidemment libres de discuter avec l’équipe d’experts présente sur place. Il est ainsi régulièrement question d’alimentation, d’approche mentale de la compétition, de préparation physique ou encore de tout l’aspect médical (prévention, gestion des blessures, etc.). Tous les sportifs se sont soumis à un screening complet, des données qui seront utiles au corps médical dans l’optique des JO.

La nutritionniste Stephanie Scheyrlinck, qui a accompagné des sportifs comme Nafi Thiam, Greg Van Avermaet ou encore Jolien D’hoore dès avant les Jeux olympiques 2016 où ils ont tous été médaillés, et qui conseille également le marathonien Koen Naert et la nageuse Fanny Lecluyse aujourd’hui, est souvent sollicitée au moment des repas. "L’idée n’est certainement pas d’interdire telle ou telle chose, je ne suis pas là pour distribuer les mauvais points, mais plutôt de responsabiliser nos athlètes au moment de composer leur assiette", explique-t-elle. "En fonction de la période où ils se trouvent dans leurs entraînements, en fonction de leurs besoins spécifiques du moment, ils doivent acquérir certains réflexes et comprendre ce qui est bon pour eux et pour leur corps à des moments précis."

Le docteur Johan Bellemans est, quant à lui, une figure plus ancienne du staff présent aux Jeux olympiques. Le chirurgien orthopédique était déjà présent lors de l’édition 2008 à Pékin où les conditions climatiques étaient déjà une source de préoccupation comme elles le sont en amont des Jeux de Tokyo. "La différence est que l’on est aujourd’hui beaucoup mieux préparé pour faire face aux conditions de chaleur et d’humidité attendues cet été au Japon" s’exclame-t-il.

Nos kayakistes Artuur Peters et Bram Sikkens ont également trouvé un terrain d'entraînement idéal.

Nos kayakistes Artuur Peters et Bram Sikkens ont également trouvé un terrain d'entraînement idéal.

"Quand je repense à Pékin, je me dis que c’était un peu la préhistoire. Ces dernières années, on a effectué de très nombreux progrès sur cette question et les résultats de nos athlètes, leurs différentes expériences au niveau des grandes compétitions internationales, y ont largement contribué. Depuis deux ans, nous travaillons à un plan antichaleur. Et on a utilisé toutes les informations qu’il nous a été possible d’utiliser : celles liées au record de l’Heure de Victor Campenaerts au Mexique, celles qui nous sont parvenues après les championnats du monde de Doha ou encore celles récoltées par nos sportifs et leurs accompagnants lors des différents test-events organisés ces derniers mois au Japon. Les grands enseignements que nous en avons tirés et qui sont susceptibles d’intéresser tout le monde ont été exposés aux intéressés durant ce stage à Belek."

Ce qui fait dire au médecin que les Jeux de Tokyo sont ceux qui sont "les mieux préparés" de l’histoire du côté belge, une affirmation qui n’offre bien sûr aucune garantie de succès sportif.

Le staff médical a été très sollicité, durant l'ensemble du stage.

Le staff médical a été très sollicité, durant l'ensemble du stage.

Quand il n'accompagne pas les athlètes, le staff travaille également en coulisses...

Quand il n'accompagne pas les athlètes, le staff travaille également en coulisses...

Isaac Kimeli est plus à l'aise sur une piste d'athlétisme que sur un terrain de hockey...

Isaac Kimeli est plus à l'aise sur une piste d'athlétisme que sur un terrain de hockey...

Avec Nafi Thiam, nos hockeyeurs incarnent notre plus grande chance de médaille à Tokyo.

Avec Nafi Thiam, nos hockeyeurs incarnent notre plus grande chance de médaille à Tokyo.

De grandes ambitions pour les Jeux

Les six médailles décrochées par la Belgique à Rio, constituant le meilleur bilan depuis les Jeux d’Atlanta en 1996, sont encore très fraîches dans les mémoires. Loin d’être une fin en soi, elles ont montré que la Belgique était sur la bonne voie et ont servi à renforcer les ambitions de notre pays sur la scène mondiale. Les résultats enregistrés ces dernières années en championnats du monde et en championnats d’Europe montrent clairement une montée en puissance. C’est pour cette raison que le président du COIB, Pierre-Olivier Beckers, n’a pas hésité à afficher des ambitions supérieures.

"Nous pensons qu’il est possible de faire mieux à Tokyo qu’à Rio et, comme les chiffres ne mentent pas, l’entreprise de référence Gracenote a indiqué récemment que la Belgique avait le potentiel pour décrocher dix médailles", explique le dirigeant. "Ceci dit, on a vu en 2016 que les prévisions ne correspondent pas forcément à la réalité du terrain et que les plus belles médailles sont parfois les plus inattendues. Décrocher une médaille olympique reste une science inexacte mais nous sommes confiants dans notre capacité à placer nos sportifs dans des conditions optimales afin de leur permettre de s’exprimer le mieux possible le jour venu. Nous espérons que cela se traduira non seulement en termes de médailles mais surtout de densité de performances : le bilan de 19 places de top 8 peut être amélioré dès Tokyo."

Dans l’immédiat, la priorité du COIB est de soutenir les athlètes en course pour une qualification olympique. Les deux équipes de volley-ball au mois de janvier, les Belgian Cats en février, et tous les autres athlètes susceptibles d’entrer en ligne de compte pour une sélection qui sera actée au mois de juillet. D’ici là, la préparation du Team Belgium continuera à battre son plein...