Les années Wilmots
Du rêve au cauchemar

"Continuons avec Wilmots, il peut nous emmener au Brésil. Marc est là depuis quelques années et a le respect de tout le groupe."
Vincent Kompany, mai 2012

Vincent Kompany ne veut pas s’apitoyer sur le sort des Diables rouges après le départ fracassant de Georges Leekens pour le Club de Bruges en 2012. Il faut aller de l’avant et remonter la pente du football belge. Plusieurs noms surgissent pour remplacer Long Couteau comme Eric Gerets, en poste avec le Maroc à l’époque, ou Michel Preud’homme. Pourtant, l’homme providentiel se trouve juste sous le nez de la Fédération selon Wilfried Van Moer, Paul Van Himst et Robert Waseige. "Je veux bien que l’on parle de Preud’homme et de Gerets", précise l’un d’entre eux lors d'une interview dans nos colonnes, "mais cela ne sert à rien de rêver puisqu’on ne sait pas les payer. De toute façon, il n’y a même pas à chercher puisqu’on a l’entraîneur idéal sous le nez. Wilmots a fait toute la préparation avec Leekens et connaît les joueurs : il mérite une chance."
Justement, pour cette jeune génération, Wilmots est une évidence. Pour les décideurs de l’UB, il doit faire ses preuves. Philippe Collin, vice-président de la Fédération, lui laisse alors deux matches dans la peau d’un T1 contre le Monténégro et l’Angleterre pour se faire les dents. D’un point de vue comptable, c’est un échec. Les Diables encaissent deux buts contre le pays des Balkans (2-2) et perdent à Wembley (0-1) malgré une prestation encourageante. Pourtant, quelque chose a changé dans le groupe. Le capitaine des Diables lors de la dernière Coupe du Monde jouée au Japon et en Corée en 2002 a marqué des points. Très influent à la Fédération, Philippe Collin ne s’en cache pas : "Nous avons joué fantastiquement bien ! Nous avons attaqué, ce qui a contraint l’Angleterre à défendre. Selon moi, nous avons eu au moins 60 % de la possession de balle. Au final, le résultat est mauvais mais j’ai bel et bien vu du beau football. L’occupation du terrain et le système tactique étaient les bons. Ce constat est d’autant plus vrai dans l’entrejeu, un secteur qui nous a fait souffrir dans un passé récent. Si nous continuons à jouer de cette manière, je suis persuadé que les résultats arriveront. Je vois un avenir de plus en plus beau pour cette sélection. Quelles sont les chances que Marc Wilmots reste sélectionneur pour la prochaine campagne ? Je peux juste vous dire qu’elles ont augmenté."
Pourtant pas favori au départ, notamment à cause d’une presse flamande qui ne l’a jamais épargné, Marc Wilmots prend sa chance. A l’époque, tous les joueurs saluent cette idée avec enthousiasme à l’image de Marouane Fellaini : "C’est normal qu’on veuille poursuivre avec ce coach. Il a montré qu’il avait les capacités pour être notre T1, aussi bien au niveau tactique que mental. Non, je ne comprendrais pas qu’il soit remplacé. Tous les joueurs veulent poursuivre avec lui. J’espère que la Fédération va comprendre que Wilmots est important pour nous. Tous les joueurs disent la même chose. Est-ce qu’il y en a un qui a dit l’inverse ?"


"Vaincre ou mourir ensemble"

Première conférence de presse: Marc fait du Wilmots et donne son premier discours en tant que T1 officiel. "Les joueurs croient en moi et me font confiance. La Fédération également, et même le public. Mais c’est réciproque. Je m’engage par conséquent à demeurer à ce poste jusqu’au Mondial 2014. Ce n’est pas la peine de m’offrir un contrat de 100 milliards ailleurs, je ne le signerai pas. La situation est donc désormais très claire pour tout le monde : on va vaincre ou mourir ensemble..."
Un discours qui tranche forcément avec celui de son prédécesseur parti gagner plus d’argent au Club de Bruges. Plus tard, il avouera ne pas garder un souvenir impérissable de sa collaboration avec Long Couteau dans l’émission La Tribune. "Sans être méchant, je n’ai pas appris avec lui. Parce que chacun a sa philosophie. Mais ce n’est pas pour cela que nous n’avons pas pu travailler ensemble."
“Où allez-vous, les gars ? On n'est nulle part !"
Wilmots décrète l’union sacrée. Mais cette génération, aussi talentueuse soit-elle, manque toujours d’un bon résultat face à l'une des meilleures nations au monde. Première réelle victime de l’ère Wilmots ? Les Pays-Bas. Dans un stade Roi Baudoin rempli comme un œuf, la Belgique étrille les Oranje 4-2. Enfin, les Diables s’éclatent contre un grand nom de la planète football. Fidèle à lui-même, Marc Wilmots ne plane pas. "Je connais la mentalité belge. Les titres de journaux en sont la meilleure preuve. “Classe mondiale !”, “Extraordinaire !” Quand je lis ça, je dis : “Où allez-vous, les gars ? On n'est nulle part ! On est à zéro !” Cela fait 20 ans que je suis dans le métier, et j’ai joué 12 ans en équipe nationale. Soit, on est les meilleurs du monde, soit les plus mauvais. On est aucun des deux. On a réalisé une bonne chose, on en a profité la nuit, mais c’est déjà oublié. Je ne suis pas un rêveur !"
Le T1 se montre tout de même satisfait de la rencontre de ses ouailles et plus particulièrement des remplaçants. La concurrence monte chez les Diables, ce qui augmente le niveau de tout le groupe. "Les réservistes ont fait basculer le match. Et j’ai vu un banc qui m’a fait penser à celui de la Coupe du Monde au Japon. Quel enthousiasme pendant le match ! Mais encore une fois : ceci n’était qu’un match amical. Il y a dix finales qui nous attendent."
Là où Georges Leekens manie souvent la langue de bois, Marc Wilmots ne fait plus dans la dentelle. Pour grandir, les Diables ont besoin d’une communication claire, nette et précise. Il s’agit de la marque de fabrique du Taureau de Dongelberg qui ne fait pas de fioriture lorsqu’il s’adresse à ses joueurs. Par exemple, il n’y aura plus de cas Hazard comme sous l’ère de Mac The Knife. Avant cette campagne, Hazardinho ne parvenait pas à réaliser les mêmes prestations qu’en club. Mais maintenant, il se sent soutenu par son entraîneur. "Marc Wilmots communique beaucoup. Il met les gens à l’aise. C’est ce qu’il nous fallait. On est derrière lui et il est derrière nous. Je n’ai pas toujours senti cela précédemment..."


Une campagne exceptionnelle

26 sur 30. Aucune défaite. Meilleure attaque et meilleure défense. C’est peu dire que la Belgique survole son groupe de qualification pour la Coupe du Monde 2014. Parfois malmenés, notamment contre la Serbie où Wilmots avoue s’être fait "exploser pendant la première demi-heure", souvent brillants, les Diables se qualifient après quatorze ans d’absence dans une grande compétition internationale.
Le 11 octobre 2013, les Diables battent la Croatie 1-2 à Zagreb. Romelu Lukaku est le héros du jour en inscrivant un doublé. Au-delà des résultats, les Diables sont à nouveau fiers de porter la vareuse de l’équipe nationale à l’image de Vincent Kompany. "Je suis content et fier de jouer pour cette équipe. Je suis content pour le pays et nos supporters. On a vu des lions sur le terrain. C’est cet état d’esprit qui nous mènera le plus loin possible surtout que nous disposons d’une belle marge de progression". Mieux, elle inspire également le respect partout en Europe. La BBC, comme d'autres, ne tarit pas d’éloges: "Durant les qualifications, la Belgique est devenue plus qu’une addition de talents, elle est devenue une grande équipe..."


Tactiquement, Marc Wilmots réussit à bâtir une équipe compacte et dure à manoeuvrer. Indéniablement, sa plus grande trouvaille demeure le replacement d’Axel Witsel. Auparavant, le Liégeois était essentiellement utilisé en numéro huit ou dix, voire sur le flanc droit. Le Taureau de Dongelberg le place désormais au poste de sentinelle, en numéro six. "Il m’arrive de discuter seul avec Axel avant les matches. C’est mon relais principal, oui. Sa position est stratégique, il faut quelqu’un en perte de balle qui sache replacer car tu ne sais pas créer de derrière à l’avant-centre. Je prends déjà beaucoup de risques car je ne joue qu’avec un 6 qui ne va pas vers l’avant, qui est un contrôleur, genre Pirlo. Il me permet d’avoir deux milieux offensifs qui viennent appuyer le 9. Je décide des bases mais il me faut quelqu’un si on a un deux contre un dans l’entrejeu, qu’est ce qu’on fait à ce moment-là ? Mettre le bloc haut ou bas ? Axel tient ce rôle." Et magnifiquement bien.
Si souvent divisée, même sous Leekens, la Belgique n’a jamais semblé aussi soudée. Un autre homme incarne parfaitement cette Belgique qui gagne: Vincent Kompany. Wilmots a trouvé la personne idéale pour porter les nouvelles valeurs des Diables. À propos de son défenseur, le T1 est dithyrambique. "Je n’ai pas besoin de m’appuyer sur cinquante leaders. Un leader doit émerger naturellement. C’est ta personnalité qui t’érige en leader. C’est la carrière que tu as menée qui consolide ce statut. C’est l’impact que tu suscites au sein d’un groupe. Il n’y a qu’un chef dans le groupe : c’est Vincent Kompany, mon capitaine. On trouve malaisément meilleur produit belge à l’exportation. Vincent est encore plus patriote que moi, si c’est possible ! Il incarne un fantastique ambassadeur de notre football. Son investissement pour les Diables est phénoménal. Il est un rassembleur, un mobilisateur hors pair. Ses équipiers sont spontanément à son écoute. J’ai de la chance de pouvoir compter sur un premier auxiliaire de cette qualité."
Autre choix payant de l’ancien joueur de Schalke 04 : instaurer Thibaut Courtois comme numéro un entre les perches au détriment de Simon Mignolet. Irréprochable durant l’ensemble de la campagne, c’est la Pieuvre qui sauve son équipe alors au bord du gouffre en Serbie.
Paul Van Himst saluait ce choix audacieux. "Quelle présence dans les buts. Il me fait penser à Lev Yachine, le légendaire gardien soviétique de mon époque. Il était aussi grand, avait de grandes mains, un bon positionnement et ne se couchait que quand il le fallait."
En deux ans, il passe de gardien novice à joueur confirmé à son poste en remportant l'Europa League en 2013. Kevin De Bruyne aussi prend une autre dimension sous Marc Wilmots. À droite, il se montre décisif avec quatre buts et autant de caviars destinés à ses partenaires en dix rencontres.
S’il ne parvient pas encore à être aussi important que dans son club, Eden Hazard semble enfin épanoui en équipe nationale car la relation a changé. Conflictuels sous Leekens, les liens entre Wilmots et le Brainois se rapprochent plus de ceux qu'entretiennent un père et son fils. "Je suis convaincu qu’Eden va exploser en sélection. Qu’attendez-vous de lui ? Qu’il marque 4 buts à chaque match ? C’est un gamin de 21 ans. Regardez sa trajectoire pour le moment. Il est en train de grandir. Il accumule des matches dans une compétition plus difficile. Ce qu’il a fait à Lille était exceptionnel. Il fallait voir son dernier match là-bas. Regardez ses stats. C’est parfait. Zidane est parti à la Juventus et il n’a pas joué pendant 6 mois. Il y a des différences de paliers à passer. L’équipe nationale, c’est le plus haut. Moi, je veux qu’Eden Hazard soit un joueur de mon groupe et il se sent bien chez nous. Dès qu’on en a besoin, il répond présent sur le banc ou sur le terrain, qu’importe. Mais l’important, c’est qu’on aille à cette Coupe du Monde. Ce que j’attends de lui ? Je ne vais pas vous le dire cela reste entre nous. Mais il va le faire."



La Coupe du Monde 2014
Apprentissage et premières critiques

Les Diables s’avancent au Brésil avec beaucoup de certitudes mais difficile de prédire leur futur parcours. L’équipe dispose d’énormément de qualités techniques mais est logiquement en quête d’expérience. Pour Philippe Collin, l’objectif est clair : qualification obligatoire pour les huitièmes de finale. "Alors, nous aurons fait le tournoi qu’on attendait. Mais pour parler de vraie réussite, on doit passer au moins en quart de finale. Et dans ce cas-là, je serais un président de la commission technique très content. Ce tournoi sera de toute façon très bon pour l’expérience de nos joueurs. Mais ils sont déjà très matures, malgré le fait qu’on a l’une des équipes les plus jeunes du tournoi."
Éliminée en quart de finale par des Argentins plus rusés, la Belgique rentre au pays avec le sentiment du devoir accompli. Pourtant, pour la première fois depuis sa prise de fonction, les critiques s’abattent sur l’entraîneur. Une certaine presse, essentiellement flamande, lui reproche son ego surdimensionné, son manque de culture tactique et une absence criante de fond de jeu sur le sol brésilien.
Comme à son habitude, Willie reste impassible. "Les critiques, je m’en fous. Nous avons gagné quatre matches de suite dans un Mondial, si ça ce n’est pas un succès… Il n’est pas question de changer d’approche. Je suis un entraîneur structuré. Avec 1-0, je suis content. Il y a deux ans et demi, est-ce que tu aurais osé parier sur le fait que la Belgique atteindrait les quarts de finale du Mondial ? Donc, je n’ai pas dû me tromper tant que ça."
"Quelle est la stratégie là derrière ? À part détruire…"
Sur le fond, difficile de lui donner tort. La Belgique n’a pas raté son Mondial. Mais offensivement parlant, on en attendait sans doute plus. Pour évoluer, son entraîneur aussi doit se remettre en question. Et il est difficile de nier que ce n’est pas la qualité première de l’ancien attaquant des Diables. Autre reproche fait au sélectionneur : la mauvaise gestion du retour de l’équipe sur nos terres. Ce retour en mode mineur après 12 ans d’absence a soulevé l’incompréhension du public car Marc Wilmots était contre l’idée d’un bus ouvert à Bruxelles.
Un family day est organisé en septembre pour tenter de sauver les apparences mais le mal est déjà fait. La Belgique avait-elle créé l’exploit ou gagné quelque chose ? Non. La Belgique avait-elle soulevé les foules ? Non, excepté ce match épique contre les États-Unis. Cette décision peut une nouvelle fois se comprendre mais après 12 ans d’absence, la pilule est mal passée du côté des supporters.
La Belgique est dans une autre dimension et ne peut, déjà, plus se contenter d’un quart en Coupe du Monde. Wilmots ne s’explique pas trop cette vague de critiques : "C’est peut-être trop beau, alors on commence à chercher des problèmes où il n’y en a pas" déclare-t-il après la compétition pour la RTBF. "Quelle est la stratégie là derrière ? À part détruire… Ou alors, placer quelqu’un d’autre, je ne sais pas…" Le vrai enseignement post-Brésil est le suivant : Marc Wilmots n’est plus intouchable.


L’Euro 2016
Regrets éternels

"Maintenant, il faut être ambitieux pour l’Euro, parce qu’à l’avenir, on va être jugé sur nos trophées..."
Clairement, les Diables n’ont plus le même statut en sortant du Mondial. Lorsque Marc Wilmots avait repris l’équipe en 2012, elle trônait à une très inquiétante 54e place au classement FIFA. Quatre ans plus tard, elle se retrouve en tête de ce même classement. Mérité ? Difficile à dire tant il en existe plusieurs lectures.
Vincent Kompany, en bon capitaine, ne boude pas son plaisir. "Numéro un mondial ? Oui, c’est génial. Et puis, on a réalisé tous nos objectifs. Que demander de mieux ? On est super content, et peu importe si ce classement est réaliste ou pas. Il faut être chauvins et profiter de ces moments. On était 80e mondial, il n’y a pas encore si longtemps. J’ai moi-même passé des moments difficiles dans cette équipe. Mais on est là et on va encore progresser, s’accrocher pour tirer le meilleur du groupe. Et puis, je le répète, on veut voir nos supporters heureux ! Allez vous balader en France, et en Hollande, soyez fiers de vous. Maintenant, on est soudés, parés pour réaliser quelque chose de bien en France."
Eden Hazard abonde dans le sens du Bruxellois. "Honnêtement, numéro un mondial, c’est énorme. Maintenant, il faut être ambitieux pour l’Euro, parce qu’à l’avenir, on va être jugé sur nos trophées... Donc, il faudrait commencer ! Il faut aussi un peu profiter ce soir, faire un peu la fête avant de se reconcentrer sur nos clubs respectifs."
Les Diables se situent désormais au sommet et sont attendus au tournant. Plus dure encore sera la chute. La Belgique se qualifie assez facilement pour l’Euro dans un groupe à sa portée. Malgré ces différents succès, les Diables peinent toujours au niveau du jeu, notamment face aux défenses regroupées. Qu’à cela ne tienne, ils sont considérés parmi les prétendants au titre pour remporter l’Euro français malgré une poule relevée avec l’Italie, la Suède et l’Irlande.
Selon le sélectionneur suédois, la Belgique part clairement favorite. "Oui. Ils sont numéros un mondiaux. Il faut respecter cela. Tous les pays, l’Allemagne et l’Espagne, les respectent. Le problème que je vois, c’est qu’ils manquent d’expérience dans les phases finales et qu’il y aura beaucoup de pression. Cette génération belge doit gagner. Ils vont le sentir mais quand on voit la qualité des joueurs et leurs résultats, oui, ils peuvent le gagner" explique Erik Hamren avant le début de la compétition. Avec le recul, le technicien ne s’est pas trompé.

Lors de son premier match, l’équipe de Marc Wilmots se prend une première fois les pieds dans le tapis. Une première défaite 0-2 qui révèle les carences tactiques de notre équipe, baladée par une Squadra Azzura bien plus mature. Toujours aussi stéréotypés dans le jeu, les Diables parviennent tout de même à prendre le meilleur sur l’Irlande (3-0) et la Suède (1-0) de Zlatan Ibrahimovic pour arracher sa qualification après s'être fait peur dans le troisième match.
Après la victoire face aux Nordiques, un journaliste demande à Kevin De Bruyne ce qu’il manque à cette équipe. Le rouquin dégaine une phrase qui depuis est devenue culte : "Je ne sais pas et je m’en bats les couilles. Les gens sont libres de penser ce qu’ils veulent. On a gagné les deux derniers matches et c’est ça le plus important."
De Bruyne il s'en bah les couilles 😂pic.twitter.com/K3Gl8nPKKd
— Renaud_FCB (@Renaud_FCB2) June 22, 2016
En huitième, les Diables jouent la Hongrie. Avec un Eden Hazard des (très) grands soirs, la Belgique s’impose 4-0 et, pense-t-on, voit son tournoi décoller enfin. Tout le monde se prend à rêver. Pour soulever le trophée, les Diables doivent tout d’abord écarter le Pays de Galles pour affronter ensuite le Portugal de Cristiano Ronaldo qui n’est pas au mieux après des qualifications laborieuses. Le chemin vers la finale semble dégagé même si les Gallois nous avaient donné du fil à retordre pendant la campagne de qualification avec un nul et une défaite.
Tout se passe pour le mieux pendant la première demi-heure face à la bande de Gareth Bale. Radja Nainggolan, un des joueurs qui n’aura pas déçu en France, parvient à ouvrir le score d’une frappe surpuissante.
Et puis, c’est l’incompréhension. Les Britanniques reviennent, étouffent les Diables qui craquent physiquement et mentalement. Les problèmes défensifs sont trop nombreux avec les absences de Jan Vertonghen, Vincent Kompany et Thomas Vermaelen. Jason Denayer prend l’eau et manque de confiance tout comme Jordan Lukaku. Les choix de Wilmots sont pointés du doigt. Comme au Mondial brésilien, la Belgique est éliminée en quart de finale. A la fin de la rencontre, les langues se délient. Thibaut Courtois attaque une première fois son ancien entraîneur au sujet de la tactique. "J’ai dit ce que j’avais à dire dans le vestiaire à ce sujet. Je ne vais pas me cacher... J’ai mis le doigt où il fallait le mettre. Après le but de Radja, on a trop reculé vers notre but. Ils ont eu plus d’espace et ont pris possession du jeu. Quand ils contrôlaient le match, on sentait qu’ils allaient marquer."
La relation est brisée. Dans une interview pour nos confrères de BeIn Sports, le Taureau de Dongelberg accuse même le clan Courtois d’avoir donné sa tactique avant un match. "J’ai juste un problème quand je fais ma théorie à 18h et que je vois qu’à 18h15, elle est sur tous les réseaux. Cela veut dire qu’un joueur a vendu la sélection. Et cela, c’est grave. Des journalistes français avaient la preuve que c’était le papa Courtois qui faisait cela. Je trouve cela dommage. Cela fait gagner du temps à l’adversaire. Je n’ai pas perdu mon énergie à chercher qui... déjà que j’avais une inflammation dans le sang et que j’avais la dose maximum de médicaments en moi pendant l’Euro…" Le père de Thibaut Courtois réfute cette théorie. En exclusivité pour la DH, il avait déclaré ceci en guise de droit de réponse: "Je n’ai jamais de ma vie communiqué une composition d’équipe à aucun journaliste ! En étant joueur de haut niveau et aussi dans un staff technique d’un club de niveau européen, je sais à quel point cela est délicat. Mes coéquipiers et joueurs le savaient également. On travaille ensemble longtemps pour obtenir des résultats, je déteste les fuites !”
"Je n'ai pas trouvé Wilmots excellent. C'était surtout 'passe la balle à Eden'..."
Récemment, c’est Jordan Lukaku qui s’est attaqué à Willie chez nos confrères d’Eleven Sports : "De toute façon, si on avait gagné cet Euro, je pense que quelqu’un aurait voulu dire que c'était grâce à lui mais il aurait juste eu de la chance d’être dans cette position avec des joueurs qui l’auraient porté vers la victoire. Je ne le trouve pas excellent (NDLR Marc Wilmots). Avec toutes les armes que l’on avait, son idée c’était “donne la balle à Eden”. C’est dommage mais cela ne change rien au fait que j’ai été nul."
Jordan Lukaku : "C'est un bon entraîneur, Marc Wilmots ?" 👀👀👀👀 https://t.co/hzmcbQYnUa
— Bruno Ahoyo (@BrunoAhoyo) February 14, 2020
La chance de la Belgique est passée. Celle de Wilmots aussi. A l’issue de la compétition, il est remercié et remplacé par Roberto Martinez dans un léger scepticisme ambiant. Pourtant, c’est bien l’Espagnol qui a réussi à faire passer ces Diables à un niveau supérieur.



Que retenir du passage de Marc Wilmots ?

D’abord vu comme un dieu, Marc Wilmots a vu son crédit s'effriter avec le temps. La faute à un manque de remise en question évident. Impossible pour lui d’avouer qu’il avait tort sur certaines décisions. L’ancien sauveur de la patrie a toujours identifié les médias comme seul maux des Diables. "Non, il n’y a jamais eu de gros problèmes en interne. Mais les médias ont aussi tenté d’impressionner les joueurs. La presse a tout essayé pour installer une ambiance négative. Ils ont à chaque fois essayé de monter Hazard contre De Bruyne. Pourquoi ? Je n’avais jamais encore vécu cela. L’ambiance était bonne."
Romelu Lukaku n’est pas d’accord avec cette version. L’attaquant n’a pas vécu que des moments faciles en sélection pendant cette période.. "Je savais que j’allais être aligné, mais je savais aussi qu’il ne voulait pas me faire jouer. Je me disais: OK, c’est bon, ne me sélectionne pas et laisse-moi à la maison. S'il y avait un problème, il devait me le dire", a détaillé l’attaquant en 2018 pour Play Sports. Avant d'ajouter: "Je joue chez les Diables avec grand plaisir, je n’ai pas dit que je ne voulais pas jouer dans cette équipe. Toutefois, à cette époque, je n’aimais plus faire partie de l’équipe nationale."
Si Wilmots fut essentiel dans le développement de cette génération dorée, il reste bien peu de monde pour remettre en cause son remplacement par Roberto Martinez après l'Euro 2016. Patriote et rassembleur, le Taureau de Dongelberg a ramené l'enthousiasme et mis l'équipe sur la bonne voie. Mais il n'était sans doute pas capable de l'emmener plus haut. Ce qu'a déjà réussi l'Espagnol... qui devra toutefois faire encore mieux au cours des deux prochaines années pour ne pas laisser le même goût de trop peu que son prédécesseur.

