Union St Gilloise – La complainte de la Butte

Les répliques de “Bossemans et Coppenolle” résonnent encore dans un coin du stade Joseph Marien. Si depuis lors, la végétation s’est installé sur certains gradins de ce stade classé monument historique en raison de sa façade en briques rouges et blanches de style "art deco", l'Union reste une équipe à part dans ce Bruxelles où Anderlecht règne en maître incontesté.

Sur fond de zwanze brusseleer, le matricule 10, fondé en 1897, était l'ogre belge d'avant-guerre. Sacrée à 11 reprises entre 1901 et 1935, l'Union s'offre aussi un record toujours inscrit en lettre d'or dans les livres d'histoire : une série de 60 matches consécutifs sans défaite (44 victoires et 16 partages), ce qui valu à cette formidable génération le surnom d’”Union 60”. Ironie de l'histoire, c’est le... Daring cher à Coppenolle qui mis fin au brevet d’invincibilité des Unionistes pour le plus grand malheur de Bossemans.

L'entrée en scène de ceux qu'on appelait aussi les Apaches avaient aussi son charme particulier. Les vestiaires des joueurs construits sur une plateforme en haut des gradins obligeaient les joueurs à descendre les “escaliers de la Butte” tels des gladiateurs rentrant dans l’arène. Gustave Vanderstappen, Achille Meyskens, Maurice Vertongen et Vital Van Landeghem enfilaient les perles et collectionnaient les titres de meilleur buteur du championnat. Mais le plus doué de la bande, Louis Van Hege, déposa aussi sa carte de visite du côté du AC Milan (97 buts en 88 matches, dont un quintuplé contre la Juventus) où il officiera pendant cinq saisons entre ses deux passages par le Parc Duden. Outre ses titres, l’Union termina 8 fois à la deuxième place et deux fois sur la dernière marche du podium.

La guerre et la période qui suivit marqua le déclin du club qui peina à rejouer les premiers rôles. Désormais privé du trône dans la capitale avec l'émergence du Sporting d'Anderlecht, l'Union ne réussit pas à franchir le cap de la professionalisation qui s'opérait petit à petit au sein des différents clubs. Si bien qu’à partir de 1965, l'USG est relégué une première fois et effectue des aller-retour avec l’élite avant de squatter définitivement dans les divisions inférieures après sa dernière saison en D1 en 1972-73 sous la houlette d’un certain... Guy Thys qui allait ensuite faire les beaux jours de l’Antwerp et de l’équipe nationale.

Si l'Union fit quelques “piges” dans l’antichambre de l’élite, c’est surtout en troisième division qu’elle se stabilisa durant les deux dernières décennies, offrant son atmosphère si particulière et bruxelloise aux équipes se rendant au Parc Duden. Conservant son côté familial, le club s’est attaché à la formation des jeunes et a notamment vu éclore Gaby Mudingayi qui a désormais trouvé en Italie une nouvelle terre d’accueil et porté notamment le maillot de l’Inter, le grand rival du club où évolua jadis la légende Louis Van Hege.

Un petit clin d’oeil au destin, histoire de rappeler que les légendes ne meurent jamais. Tout comme les rêves d’une nouvelle ère dorée que certains supporters, discutant sous la buvette située sous la tribune principale, espèrent voir débuter avec un potentiel retour à l’étage supérieur à la fin de la saison.






Beerschot, par amour du style

C’est l’histoire d’un club frappé par une malédiction, mais béni par les dieux du football.

En Italie, la Fiorentina est souvent présentée comme un club maudit. Une équipe toujours élégante, mais seulement experte dans l’art de perdre avec style. Avec son maillot mauve, son âme romantique et son palmarès presque immaculé, le Beerschot amène un peu de Florence sur les rives de l’Escaut.

Parce qu’il était écrit que l’histoire devait commencer comme cela, le club anversois est le premier relégué officiel de la Division 1. Des débuts maudits avant une longue histoire d’amour avec l’élite nationale puisque jusqu’en 1981, le Beerschot enchaîne 66 saisons en D1. Avec sept titres de champion avant la Guerre. Et puis, plus de titre. Mais tellement de football.

Ce Beerschot-là, c’est celui de Rik Coppens. Follement génial mais jamais gagnant. Le premier homme à s’être chaussé d’or l’a fait avec 36 buts inscrits en une saison, mais aussi avec une anonyme onzième place pour son club. Remplir l’armoire à trophées, Rik n’en a cure. L’important, c’est de remplir le Kiel. Et cette mission-là est toujours accomplie.

Même sans Coppens, le Beerschot ne changera plus d’identité. Le club gagnera bien deux Coupes de Belgique dans les seventies, notamment une en 1979 par la grâce de Juan Lozano. Dernière heure de gloire du « vrai Beerschot », relégué administrativement en 1991. Le club ne remontera plus jamais, et se noiera même jusqu’en Promotion avant de débrancher la prise au bout de 99 ans et neuf mois d’existence. Parce que ce club était trop fantasque pour devenir un centenaire raisonnable.

Le Kiel n’est pas resté à l’abandon pour autant. Il y a d’abord eu le GBA, né sur les cendres du Germinal Ekeren et installé au Kiel contre un peu de mauve sur son maillot. Un club perdu entre la grinta d’Ekeren et la belle mélancolie du Beerschot. Entre une Coupe de Belgique remportée face à Bruges avec des buts de Karel Snoeckx et Kris De Wree et quelques moments de douce folie footballistique avec les buts de François Sterchele, les dribbles d’Hernan Losada et les inspirations divines de Gustavo Colman.

Ce Beerschot-là aussi a fait des folies. Les Anversois avaient un appétit de géant et voulaient s’inviter aux grandes tables, mais leurs poches étaient vides au moment de payer l’addition. Relégués, les Mauves de la Métropole ont mis la clé sous le paillasson. Tous, sauf les supporters, qui ont confié les clés du Kiel au Beerschot-Wilrijk, reparti de première provinciale vers une nouvelle conquête des sommets. Pour sa première saison, le club a fêté le titre devant 12.000 spectateurs. Et semble en route pour rejoindre la D3 en fin de saison. Mais prudence : avec le Beerschot, les belles histoires ont une furieuse tendance à finir mal.